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Critique de gerardmuller


Le voyageur sans bagages /Jean Anouilh
Je viens de relire avec un immense plaisir cette comédie brillante et pleine d'humour de Jean Anouilh.
Elle met en scène un certain Gaston qui a été gravement blessé en fin de guerre 14-18 et a perdu la mémoire de tout son passé. Durant de nombreuses années, en soins dans un hôpital spécialisé, on a tenté de lui faire retrouver la mémoire. Finalement au bout d'un certain temps, il est réclamé par plusieurs familles dont la famille Renaud de la haute bourgeoisie, à laquelle, guidé par la duchesse Dupont-Dufort, dame patronnesse, famille avec le directeur de l'asile, il est confronté.
D'un caractère gentil mais souvent sarcastique, Gaston découvre avec horreur l'identité qu'on lui attribue. Jacques, le pseudo Gaston, était un personnage violent et sans scrupule, capable de coucher avec la femme de son frère Georges peu après le mariage de celui—ci. Gaston ne se reconnait absolument pas dans Jacques. Après quelques moments de doute pour Gaston, c'est un indice fortuit qui va dénouer l'énigme et aboutir à un dénouement inattendu.
Explication du titre : l'expression « sans bagages » est une métaphore faisant référence à l'amnésie de Gaston, le personnage central. Et la question lancinante pour Gaston et le lecteur est bien de savoir comment faire accepter à un homme un passé dont il a perdu tout souvenir ? La thématique centrale de cette comédie se rapporte à l'identité façonnée par le passé et l'oubli de certains moments de celui-ci. Et là se pose la question : les autres peuvent-ils décider pour nous de notre identité ? Dans un autre ordre d'idées, cette pièce veut nous dire qu'il faut accepter son passé, même lourd et incohérent ou en désaccord avec ce que l'on éprouve dans le présent. Alors, Gaston le peut-il ? Ne cherche-t-il pas à passer aux yeux des autres un autre que ce qu'il fut ? Comme pour Gaston son passé n'existe pas, il aurala possibilité de le refuser en choisissant une famille plutôt qu'une autre. Sera-t-il capable de le faire ? Autant de questions intéressantes abordées dans cette pièce.
Extrait :
« Je ne suis pas Jacques Renaud : je ne reconnais rien ici de ce qui a été à lui. Un moment, oui, en vous écoutant parler, je me suis confondu avec lui. Je vous demande pardon. Mais voyez-vous pour un homme sans mémoire, un passé tout entier, c'est trop lourd à endosser en une seule fois. Si vous voulez me faire plaisir, pas seulement me faire plaisir, me faire du bien, vous me permettriez de retourner à l'asile. Je plantais des salades, je cirais les parquets. Les jours passaient... Mais même au bout de dix-huit ans - une autre moitié exactement de ma vie - ils n'étaient pas parvenus, en s'ajoutant les uns les autres, à faire cette chose dévorante que vous appelez un passé. »
Cette comédie en 5 tableaux a été créée en 1937 au théâtre des Mathurins à Paris.
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