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Critique de Root


Root
21 février 2020
Roman a la rage qui déborde et des coups à rendre. Gamin brisé par le ceinturon, chahuté d'un foyer d'accueil à l'autre, il était timide, solitaire, inadapté. L'école lui demandait une patience qu'il n'avait pas envie de lui accorder. Son truc à lui, c'était plutôt le sport.

Aujourd'hui, il fait ses preuves dans une académie de boxe du sud de la France. Mais il ne se sent pas l'étoffe d'un pro. Pour son coach, il donne le change, mais son esprit est ailleurs. La discipline ne lui conviendra jamais. Et au-delà des murs de l'académie, il y a un monde fait de tentations auxquelles il veut goûter.

Un club éphémère, où s'organise une soirée où les corps boostés aux ecstas, hydratés à la vodka, se rencontrent au rythme de la hardtek. L'orgie commence sur la piste de danse et dans les étages, toute trace de morale s'envole. À peine apparue, Ana disparaît dans la foule décadente. Cette fille, elle lui a fait un truc, à l'intérieur, dans le coeur, dans l'âme, un seul regard, une décharge électrique. Elle n'est pas partie bien loin, Ana, elle est là, avec des amis, qui prend l'air et qui trinque. Roman s'incruste un peu.
Au matin, gueule de bois incluse, il émerge dans une villa paradisiaque où butinent une dizaine de jeunes gens insouciants et heureux de l'être. Drogue, alcool, argent, musique… On dirait oui à bien moins. le petit ange assis sur son épaule lui rappelle qu'il a des obligations à l'académie, mais à chaque remontrance de sa conscience, c'est tout son être qui lui répond : Ana. Alors très vite, Roman intègre la bande et s'installe à la villa. Les journées sont sans heures, la liberté sans prix. Pour l'instant. Car au fond de lui, ça tiraille, il sait très bien que tout ça va mal tourner.

Ce qui se trame dans la tête d'un boxeur me semble aller au-delà de la compétition elle-même : il y a la virilité d'un homme, son honneur, tout ce à quoi le renvoient les coups qu'il prend, et ceux qu'il donne. Durant le match se joue une guerre intérieure qui sera remportée, ou perdue. Pour Roman, l'enjeu est gros. Il a beaucoup à reconstruire. Mais le chant des sirènes est trop fort. Toi, tu as envie de lui dire : « Tais-toi ! », « Tu vois pas que ça va trop loin ? », « Mais tire-toi de là, putain ! », et tu n'en fais rien. Parce que c'est Joseph d'Anvers qui est aux manettes. Vous avez un joli nom, monsieur d'Anvers. C'est ce qui m'a amenée ici. Je me disais que Joseph d'Anvers, il avait forcément écrit un beau livre. Et je ne m'étais pas trompée. Un joli nom et du talent plein les doigts. C'est au travers de romans comme celui-ci que s'affirme ma préférence pour la littérature française. le poids des mots, sans le filtre de la traduction. Juste une balle perdue, c'est l'expression pure des sentiments qui agitent les tripes du lecteur autant que celles du narrateur. C'est une palette d'émotions bouleversantes, une beauté singulière qui rampe dans la brutalité du monde.

Kaléidoscope : instrument tubulaire contenant un jeu de miroirs et des fragments de verre mobiles, diversement découpés et colorés, produisant des figures qui varient à chaque secousse de l'appareil.
C'est l'effet que m'a fait ce roman : à mesure que tu tritures les pages, c'est un peu comme si tu secouais le héros pour découvrir la vie sous toutes ses nuances. Puis j'ai avalé le kaléidoscope. Avec ses morceaux de verre qui mettent la gorge à vif.

Rock'n'roll, poétique, électrique, hypnotique.

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