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Critique de dlcb26


Lu dans le cadre du club de lecture, thèmes de février-mi-mars 2023 : "mythologie" et "amours impossibles/contrariées", j'ai réussi avec ce texte à faire d'une pierre deux coups !
Psychée et moi, c'est comme avec Antigone : une longue histoire ! Disons pour faire court que par exemple je traduisais du latin Apulée à 2 heures du matin en Terminale quand je faisais une grosse insomnie ! Je trouvais touchante cette histoire d'amours contrariées, version antique des contes de fées. C'est donc assez rapidement que j'ai pensé à ce récit quand nous avons choisi les thèmes du club de lecture ce mois-ci !
Mais les années ont passé, je suis moins naïve, moins fleur bleue et plus mature ! le romantisme de l'adolescente s'est tempéré avec les ans, les expériences, les études, et le regard est plus critique !
Bref, je n'ai pas retrouvé dans cette lecture "l'enchantement" simpl(ist)e initial, et je mesure davantage toute la complexité des personnages ... et surtout à quel point ils reflètent les moeurs et l'époque de leur auteur. Ainsi les dieux sont très humains dans leurs sentiments : Vénus est jalouse, Eros un enfant gâté et rebelle, ...
Que dire de l'héroïne ? Psychée est complexe ! Au début elle est malheureuse de sa beauté et de l'admiration dont elle fait l'objet : un point de vue intéressant à notre époque glorifiant le paraître, une certaine beauté et un esthétisme artificiels et le "se faire voir"; en cela je la trouve très moderne. Mais la raison de son malaise est bien de son époque: elle sent bien que sa beauté est "trop" et offensante quand on est une simple mortelle, et en même temps qu'elle aspire à un bon mariage comme ses soeurs aînées (ça ou vestale, à l'époque, guère de choix!), elle se dit que sa beauté l'en écarte ! Alors elle accueille avec presque soulagement l'oracle qui la condamne à être offerte à un monstre. Après l'enlèvement, elle se résigne d'abord à son sort, apprécie les biens matériels dont elle jouit, le confort de se faire servir, et se donne à son amant inconnu sans rébellion puis avec entrain; mais quelle passivité et résignation, difficilement concevables pour nous aujourd'hui! Ensuite, sa famille lui manque, et elle s'inquiète de leur tristesse de l'avoir perdue... cet amour familial est plutôt à son honneur et témoigne d'une certaine maturité et un sens de l'altérité; mais le passage avec les soeurs révèlent l'infantilité, la naïveté et le caractère influençable de Psychée, qui bien que dûment et explicitement avertie plusieurs fois par son mari qui l'aime vraiment, se laisse avoir comme une idiote ! Une fois chassée par Eros (qui s'en va se soigner et pleurer dans les jupes de maman Vénus, l'affreuse belle-mère !), Psychée ère toute à son chagrin et cherche des appuis, y compris divins, puis livrée à Vénus, elle se retrouve punie/mise à l'épreuve. Là, Psychée m'a énervée : elle ne pense qu'à mourir au début de chaque épreuve à laquelle est confrontée mais dont heureusement elle triomphe parce que quelqu'un la réalise à sa place ! Pas très combattante pour sauver son amour, la demoiselle ! j'ai eu envie de la secouer quand elle fait, malgré ses malheureuses expériences précédentes, encore preuve de curiosité en ouvrant la boîte de Perséphone : idiote à nouveau, qui n'apprend pas de la vie ! Heureusement, tout est bien qui finit bien !
Apulée montre les figures féminines de manière guère positive : naïve, infantile, curieuse, désobéissante, enfant gâtée (Psychée), méchantes, envieuses, jalouses, rancunières (les soeurs; Vénus). Seules l'humilité et la docilité, la résignation de la femme devant le destin/les ordres (et de l'humain devant le divin), permettent de s'en sortir et d'obtenir le bonheur. La morale n'est pas du tout XXI°siècle ! Dans le contexte actuel, je me suis dit que ce texte risquait de se faire censurer/réécrire, vu les idées qu'il véhicule, ... si on oublie le contexte d'écriture, les moeurs et idées de l'époque de l'auteur: l'Antiquité romaine du II°s ap.JC !
Néanmoins, quand on y réfléchit, nous retrouvons indubitablement de nombreux échos de ce texte dans les textes des siècles suivants : des contes comme Cendrillon, la Belle et la Bête, ou des fictions plus modernes comme Jane Eyre, Pretty Woman, ou même les bleuettes young adult et mummy porn, type la fiction polonaise 365, pour le côté syndrome de Stockholm !
Qui se lancera dans une réécriture de cette histoire, en donnant la parole à Psychée? (SVP : Madeline MILLER !!!! ou même Pat BARKER) Sans en faire une de ces féministes ultras, il y aurait de quoi faire ...
Il y a d'ailleurs : Moi, Psychée, prévu chez les Ateliers-Henry-Dougier pour avril 2023 ... vais-je y résister ? non !)
Pour les curieux, il y a une pièce de Molière et un texte De La Fontaine sur le même sujet !
PS: quelques choix que j'ai trouvés peu heureux car trop XXI° s dans la traduction proposée (expressions, tournures de phrase, vocabulaire) : dommage ! Mais cette édition est souvent destinée aux scolaire du Secondaire donc il faut bien rendre le texte attractif et compréhensible....
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