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Critique de Bouvy


Critiquer Emmanuelle, je n'oserais pas! Il faudrait être un fameux goujat pour se permettre une telle offense. Un jour, un ami très intellectuel de nature me demande : "As-tu lu Emmanuelle ?" Je lui répondis niaisement : "Non !".
"Alors si tu n'as pas découvert ces livres, tu n'as rien lu ! C'est un chef-d'oeuvre de littérature!"
Il sort alors de sa bibliothèque les deux tomes écrits par Emmanuelle Arsan. A sa question de savoir si j'avais vu les films, je lui ai aussi répondu par la négation. J'étais trop jeune à l'époque de leur sortie. En ces temps des années soixante-dix, dans les petites bourgades de province, il y avait en général deux cinémas. L'un appartenant à la paroisse et qui défendait la pudeur et pratiquait l'autocensure et l'autre, financé par un parti défendant la liberté de penser, plus licencieux. Adolescent, nous préférions les valves du dernier, admirant les affiches les plus osées, devant lesquels nous nous émouvions de découvrir de temps à autre les seins d'une jeune actrice aux mamelons camouflés d'une pastille blanche. Quel âge avais-je quand nous admirions l'affiche sur laquelle était assise la belle Silvia Kristel sur ce fameux fauteuil en osier? 11 ans, 12 peut-être ? Elle semblait nous fixer droit dans les yeux, nous annonçant qu'enfin, la révolution sexuelle atteignait nos campagnes.
Devenu adulte, j'ai pensé que cet érotisme des années septante (soixante-dix pour mes amis français) était devenu bien désuet et que par simple préjugé, j'étais persuadé que ce genre littéraire devait être mineur. Je n'aurais, suite à ce prêt, jamais imaginé découvrir un style si riche. Voilà un roman réellement spirituel, élevant l'érotisme au rang de philosophie, de religion. Et quelle belle écriture, quel sens de la phrase, de la métaphore, de la poésie. Depuis cette lecture, je n'oserais même pas tenter voir le film. Comment ne pas bafouer un livre si bien écrit en le couchant sur une pellicule ?
Voilà pourquoi j'ai sélectionné ce roman parmi ceux que j'emporterais sur une île déserte. Quitte à être seul, autant l'être avec Emmanuelle. J'aurais bien sélectionné aussi le premier tome mais, n'ayant droit qu'à six livres, j'ai fait un choix. Pourquoi l'Anti Vierge ? C'est sans doute dans ce deuxième tome qu'Emmanuelle est la plus épanouie, à la fois plus forte et plus vulnérable, plus désirable. Vous n'avez pas encore lu Emmanuelle ? Alors, je vous souhaite de rencontrer un ami qui, délicatement, le sortira de sa bibliothèque en vous demandant : "As-tu lu Emmanuelle ?" et en vous répondant quand il vous le confiera " Non ? Alors, tu n'as encore rien lu !"
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