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Critique de motspourmots


Qui n'a pas fantasmé sur le temps des voyages en paquebots, synonymes d'époques où le trajet faisait tout autant partie de l'expérience que la destination ? Pierre Assouline en restitue si bien l'ambiance qu'on le soupçonnerait presque de revenir du passé pour raconter. Embarquer sur le Georges Philippar à sa suite est un plaisir gourmet, il suffit de se laisser aller aux subtiles descriptions d'une plume élégante et généreuse.

Nous sommes en février 1932 et l'Europe hésite encore à penser que l'après-guerre est en train de se transformer en entre-deux-guerres. le Georges Philippar est un paquebot flambant neuf dont la croisière inaugurale embarque 358 passagers au départ de Marseille vers le Japon. Parmi eux quelques privilégiés invités par la compagnie, des industriels, des artistes de différentes nationalités. Et Jacques-Marie Bauer, libraire spécialisé en livres rares, chasseur bibliophile au service d'amateurs éclairés et collectionneurs en tout genre. Un personnage délicieux, fin observateur de ses contemporains, passionné à tendance contemplative, de ceux qui vivent à moitié dans les livres qu'ils préfèrent à d'autres fréquentations. A tel point qu'il cite sans même y penser. "Ah Bauer... A force de faire des citations, vous mourrez un jour d'une rupture d'aphorisme" s'amuse joliment l'un de ses voisins de pont. Des liens se nouent, des conversations s'engagent, des regards se chargent de promesses... le temps s'étire dans une forme d'insouciance alors que les échos de la situation en Europe suscitent inquiétudes et débats enflammés lors de discussions de fumoir. Et puis les petits incidents de circuit électrique font parfois surgir les spectres de naufrages passés. Tout ceci est une sorte de représentation, chacun joue son rôle et c'est un réel plaisir pour le lecteur d'assister à la générale aux premières loges.

Tout le talent de Pierre Assouline est dans cette reconstitution impeccable et pleine de vie à l'aide de personnages merveilleusement incarnés dans une ambiance où l'insouciance est peu à peu grignotée par des nuages annonciateurs de drames, à petite et à plus grande échelle. Sous cet aspect suranné, les observations autour de la montée des nationalismes en Europe provoquent un écho glaçant avec notre époque. Et nous rappellent qu'à tout moment des mondes changent, meurent et pas toujours pour que naissent des meilleurs.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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