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Critique de zenzibar


« L'amour m'agite hélas, comme le vent secoue le tronc d'un jeune chêne » (Sappho)

L'ile Lesbos de la légendaire poétesse est le lieu de ce roman ; ce récit contemporain se situe à la lisière du conte empreint de tragique. Enfin quand je parle de contemporain, c'est en référence au temps calendaire car en réalité cette histoire semble hors du temps dans un espace lui même affranchi de dimension terre à terre si j'ose dire.

La cohabitation difficile, voire impossible, entre l'homme et la nature, plus précisément entre l'univers terrien, abîmé par l'homme et celui de la mer.

Entre deux, une femme, Angela, prise dans son enveloppe terrestre humaine.

Le narrateur, Dimtri, jeune étudiant s'offre une période sabbatique dans un lieu isolé près du village de Sigri, sur la pointe occidentale de l'ile. Il investit une cabane très rustique pour mener une vie d'ermite, parcourant, solitaire les chemins escarpés et les rives dans l'azur égéen.

Dimitri fait la connaissance de Thomas, le pêcheur de pieuvres et père d'Angéla. Il est alors amoureux de la très belle et très terrienne Elisa, rencontrée sur l'ile tout récemment, une idylle en lévitation. Elisa, la Beauté fragile d'une fresque lumineuse et Angela au corps musclé et halé.

Une histoire où un autre acteur devient omni présent, au centre de ce trio, à l'horizon qu'il sculpte par flagrances, dans l'écume qu'il met en ébullition…

Une histoire de dauphin, d'amour terrestre contrarié, l'ile d'Amorgos n'est pas si éloignée..., mais contrairement aux apparences, ce livre n'est pas une avant première du « Grand bleu » de Luc Besson.

Spontanément, je songe plutôt à cet extrait des Chants de Maldoror de Lautréamont

« Vieil océan, aux vagues de cristal, tu ressembles proportionnellement à ces marques azurées que l'on voit sur le dos meurtri des mousses ; tu es un immense bleu appliqué sur le corps de la terre : j'aime cette comparaison.
Ainsi, à ton premier aspect, un souffle prolongé de tristesse, qu'on croirait être le murmure de ta brise suave, passe, en laissant des ineffaçables traces, sur l'âme profondément ébranlée de tes amants, sans que s'en rende toujours compte, les rudes commencements de l'homme, où il fait connaissance avec la douleur, qui ne le quitte plus. Je te salue vieil océan ! » (p. 56)

Peu à peu, Dimitri au fil de ses contacts de plus en plus étroits avec Thomas, approche la farouche et mystérieuse Angela, efficace intendante de la maison familiale habitée de ses jeunes demi-frères et de son père. Angela disparaît régulièrement en mer, dans sa barque ou en immersion….elle est une nageuse singulière, puissante et agile.

La passion consume les êtres mais d'emblée, au trouble de ces noces de l'eau et de la lumière s'ajoute une sourde menace. le basculement intervient, violent, une faille phosphorescente s'entrouvre. Angela, un trait d'union dans tous les sens du terme, entre une harmonie sans age et les soubresauts d'émotions humaines. Un saut auquel Dimitri renonce en définitive.

L'auteur fait merveille à capturer la Beauté des paysages sauvages et des embrasements sensuels.

Triste coïncidence, l'ile de Lesbos a été récemment au centre des attentions en raison de la situation tragique de migrants. Un rappel, s'il en était besoin, que ces lieux ne sont pas seulement fréquentés par des souffles divins mais aussi depuis l'antiquité par des drames humains. Mais ceci ne doit absolument pas dissuader de lire ce très beau livre !!
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