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Critique de Mhfasquel


Un roman dans lequel Marcel Aymé nous livre un conte philosophique historique. L'intrigue sert la réflexion et nous interroge sur l'après-guerre, dans cette France scindée en deux, celle des collaborateurs et des résistants, celle des vainqueurs et des matamores, celle des patriotes et des ennemis. Et surtout celle de tous ceux qui ont attendu que ça se passe...
« Cette vague d'hypocrisie, qu'il croyait voir déferler sur la France, prenait maintenant à ses yeux des proportions grandioses. »
Troisième volet d'une trilogie consacrée à la Deuxième Guerre Mondiale (avant-guerre, Occupation et ici Libération et épuration, époques que l'auteur a bien connues, lui qui fut même un temps mal vu après avoir publié dans des revues collaborationnistes tels que Gringoire ou Je suis partout), ce livre nous questionne sur le bien-fondé de nos choix, de nos actions ou de nos passivités, tout en finesse, sans aucun manichéisme, mais en toute impitoyable lucidité. Par le biais de situations cocasses, ridicules, follement dangereuses, paradoxales.
Dans ce récit truculent, avec l'humour percutant et ravageur et la grande acuité d'observation qu'on lui connaît, Marcel Aymé campe avec tendresse, mais sans illusions des personnages qui doutent, tâtonnent, essaient, cherchent à se racheter, s'arrangeant comme ils peuvent avec leur conscience, se réinventant tant bien que mal un futur... Profondément humains.
Désabusé, mais serein, féroce, mais indulgent, il fait le bilan désenchanté de cette période sombre et ambivalente de notre histoire dont les plaies sont encore à vif (écrit en 1948) et renvoie finalement tout le monde dos à dos, avec toutefois une affection particulière pour celui qui s'efforce de se dégager de l'influence mortifère d'Uranus pour décider d'aimer cette vie qui ne lui a pas été ôtée, à tout prix. Tout un symbole...
« Il pensait à tous ces hypocrites, au nombre desquels il se comptait lui-même, et que rien n'obligeait à taire leurs convictions ni à feindre d'en avoir d'autres. »
La drôlerie dévastatrice d'Aymé ne nuit pas à la gravité du sujet, bien au contraire, et le comique – irrésistible – sert un propos qui nous laisse ébranlés, perplexes et émus.
« Désoeuvré, il tourna autour de la table, puis réfléchit à une disposition des meubles qui eût laissé plus d'espace pour se mouvoir. Par exemple, on pouvait mettre la commode sur la desserte et le bonheur-du-jour sur le secrétaire. »
Du grand Marcel Aymé, avec beaucoup d'échos dans les traumatismes, inquiétudes, clivages, fractures et montées des intolérances actuels. À lire ou relire sans plus tarder.
Lien : https://sharingteaching.blog..
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