Les mythes, pour
Barthes, ont pour particularité d'être des objets historiques qui se font passer pour naturels. En lisant
les Mythologies aujourd'hui, on est d'abord frappé par leur côté daté. Les certitudes et les habitudes d'il y a un demi-siècle sont devenues des reliques, des bizarreries, de vagues souvenirs ou d'illustres inconnus. Qui parle encore de
Minou Drouet, du Guide bleu et de Poujade? Les mythes se sont évaporés. Qu'en est-il de leur fondement, ce monde petit-bourgeois dénoncé par
Barthes? Là aussi, ça sent son époque. Les bourgeois contre les prolétaires, ça sonne guerre froide, intellectuel de gauche de jadis, enfermé dans une pensée elle-même mythologique. Ce qui ne passe plus, dans ces textes, c'est leur certitude d'être objectifs, de décrire la classe oppressante, de la démasquer, comme si la lutte des classes n'était pas elle aussi un mythe. Peut-être ce sentiment que tout cela a disparu vient-il de la victoire des mythes bourgeois à la chute du communisme. Que serait une mythologie d'aujourd'hui?
Minou Drouet s'est transformée en Justin Biber, et les coureurs du Tour de France, ces héros d'épopées grandiloquents, ces Coppi, ces Geminiani, ces Kubler et ces Bobet, sont devenus des bobets sans majuscule et sans honneur. Elles seraient désabusées, grinçantes et futiles,
les mythologies d'aujourd'hui.
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