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Critique de Acerola13


Ce livre est un énorme coup de coeur, auquel je ne m'attendais pas du tout, pensant lire un simple roman d'aventures mettant en scène la célèbre forteresse d'Alamut.

Si les deux premiers chapitres m'ont intriguée par leurs protagonistes un peu naïfs, la suite révèle toute la maestria de Vladimir Bartol, qui parvient en quelques 600 pages à nous décrire les remous qui agitent la société iranienne du XI siècle, prise entre les influences seldjoukides et fatimides, la prééminence religieuse de l'arabe et l'héritage persan millénaire, et les différents schismes de l'Islam, entre autres celui de l'Ismaélisme. le lecteur plonge avec délice dans ce cadre médiéval et raffiné, où la poésie n'est jamais bien loin.

Mais au-delà de ce décor enchanteur qu'on pourrait presque qualifier d'orientaliste, Alamut nous livre l'extraordinaire récit des conclusions philosophiques d'un homme, Hassan ibn al-Sabbah, et de son machiavélique plan qui en découle : manipuler de jeunes hommes en leur entr'ouvrant les portes d'un paradis factice, qu'ils ne retrouveront qu'à leur mort, vers laquelle ils se précipitent dès lors de bonne grâce. On frémit comme les autres personnages à la découverte de ces tractations, et on ne peut pourtant s'empêcher d'écouter cet homme qui justifie ses actes par une réflexion approfondie sur le bonheur des uns et des autres, sur le sens d'une vie, sur la capacité supérieure de certains à questionner ce qui les entoure et à ne pas se contenter de notions superficielles...

Loin d'être un roman cynique sur la manipulation des foules, Alamut attendrit par ses personnages complexes, tiraillés entre leurs sentiments passés et présents, entre leurs idéaux et leur mise en pratique ; l'amour y tient une grande place, sans jamais tomber dans une mièvre romance.

Que dire enfin de cette extraordinaire narration qui emprunte à la fois à la quête initiatique pour Halima et Ibn Tahir, à la dialectique lorsque Seïduna explicite et argumente sa stratégie en compagnie de ses compagnons, au théâtre lorsque ces derniers s'installent pour observer leurs cobayes lors de l'acte suivant, et bien sûr aux tragédies grecques dans le dénouement des trajectoires de certains des personnages...

Époustouflant et terriblement moderne, tant la parabole du Vieux de la Montagne fonctionne quelle que soit l'époque ; au risque de me répéter, c'est un vrai coup de coeur !
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