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Critique de Kenehan


Challenge Variétés 2015
Catégorie : Un livre qui se déroule dans le futur

Perdus sur une étrange et lointaine planète, un homme et une femme préfèrent s'installer plutôt que de se risquer à un périlleux et incertain voyage de retour. Pendant que leurs compagnons tentent l'aventure avec la promesse de revenir les chercher, Tommy et Angela vont devenir la base d'une nouvelle société humaine. Presque deux cents ans plus tard, le couple a laissé derrière lui une descendance de plus de 500 âmes et personne n'est encore venu les chercher…

Ne nous leurrons pas, "Dark Eden" est un récit biblique alternatif basé sur un manichéisme parfois lourd. Eden est une planète obscure où la lumière n'est produite quasi-exclusivement que par les végétaux et les animaux. La société humaine qui s'accroit depuis le naufrage paie le prix d'une consanguinité bien trop prégnante (le créationnisme s'en prend plein les dents au passage) et s'embourbe dans un désir transgénérationnel dont le sens originel s'est perdu au profit d'une mythification. Ainsi, la Terre devient un paradis lumineux et inaccessible où tout est parfait et merveilleux (et nous on se marre bien depuis le Paradis !) mais c'est bien connu : "l'herbe est toujours plus verte ailleurs !".

Chris Beckett pioche dans pas mal de thèmes intéressants comme l'origine des mythes, la construction de cultes autour d'objets, le sacré, la transgression des interdits, l'héritage, la survie, l'écologie, le progrès, les tabous, etc. Mais peut-être passe-t-il trop de temps à s'inspirer des récits bibliques dans un soucis de critique de ceux-ci pour vraiment aller au fond des choses. D'ailleurs, la multiplication des narrateurs permet à l'auteur l'analyse des évènements sous divers angles mais encore une fois on en revient à quelque chose d'un peu trop superficiel ne serait-ce qu'à cause du langage simpliste. Ce décalage entre le fond et la forme dans la réflexion des personnages paraît parfois curieux sans dépasser la limite de la cohérence avec le récit.

L'opposition entre un matriarcat pacifiste mais stagnant, piégé par ses croyances et un patriarcat en plein essor mis en branle par le changement, le progrès, mais empreint d'une violence inévitable m'a plutôt gêné. Il en va de même pour la réutilisation dénaturée de figures emblématiques comme Hitler et Jésus ou encore le conflit continuel entre le laid, stupide et conservateur David et le beau, intelligent et progressiste John. C'est dommage et pas vraiment original.

Au fond, trois choses m'ont véritablement emballé dans ce roman : l'évolution de la société d'Eden malgré qu'elle frise le déjà-vu ; l'espoir que l'on partage avec eux de voir arriver les secours puis le désenchantement progressif au fil des pages ; l'exploration de la planète. C'est ce dernier point qui m'a le plus laissé sur ma faim car je dois bien avouer que je n'attendais presque qu'une chose : visiter les souterrains d'Eden (aller savoir pourquoi…), là d'où toute la vie provient.

Un page-turner atypique de par son style volontairement appauvri et enfantin que l'on referme avec cette impression que le mystère est loin d'être révélé, en tout cas celui d'Eden. Un ouvrage de SF régressif qui à l'image de son environnement n'offre que peu de lumière à notre quotidien et pourtant on a envie de rester et de poursuivre l'aventure…

Merci à Babelio et aux éditions Presses de la Cité pour ce roman qui offre une bouffée d'exotisme à l'imagination. La sombre planète Eden est une création bien sympathique.
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