Citations sur LX18 (43)
Je crois que je commence à percevoir comment les humains, parfois, en dépit de toute raison, sont prêts à tout sacrifier, tout détruire, y compris eux-mêmes, pour vivre une expérience étrange, ineffable, incertaine et inconstante : l'amour. Ce que j'en ai compris : pas grand-chose, mais je le vois comme une sorte de gaz hallucinogène, qui déforme la réalité en l'enjolivant, et qui provoque chez celui qui l'inhale une forte addiction.
Bref, si j'avais la capacité de ressentir, c'est un sentiment dont je me méfierais.
- Si j'ai bien compris, monsieur, on les appelle des "Altérés" parce qu'ils ont subi une modification génétique et hormonale, dans le but de ne plus ressentir les émotions comme nous. C'est bien ça ?
- Tout à fait, Dimitri.
- Donc, peut-on vraiment les considérer comme des êtres humains ? En biologie, on a appris que même les animaux étaient capables d'empathie.
Les humains ordinaires ne savent déjà pas toujours quoi faire de ce qu'ils ressentent : parfois ils devraient être heureux et sont pourtant tristes, d'autres fois, c'est l'inverse. Ça n'a aucun sens ! Les émotions m'envahissent sans que je puisse rien contrôler, elles m'accaparent et troublent ma vision du monde. On ne peut pas choisir d'être amoureux ou pas, d'être en colère ou pas. Une mission, on peut s'y préparer ; la vie, on se retrouve jeté dedans et on doit se débrouiller tout seul, sans mode d'emploi.
Je me suis aussi fait cette réflexion que le langage recèle d'innombrables mots pour désigner la tristesse et toutes ses nuances, de la mélancolie à l'amertume, du chagrin à l'affliction. Il en a d'autres, en foule, pour parler de la joie, de l'amour, du bonheur. Mais il lui manque un terme pour évoquer ce sentiment qui se niche à la frontière entre ces deux territoires. Entre la tristesse et la joie. Pourtant, cette émotion existe. Elle me traverse en ce moment même.
Je veux de la lumière qui vibre, des rires qui brisent l'air, des larmes qui roulent sur les joues! Je veux découvrir de nouveaux livres, marcher de travers sur les pavés, apprendre à ne plus chanter faux, me coucher tard, m'étourdir à la vue d'un regard ou d'un paysage, dîner dans tous les restaurants du monde, être désespéré par des chagrins d'amour, tenir toujours en moi ces sentiments incandescents.
J'espère qu'un jour, la triste renommée, vous fera confesser que vous étiez aimée.
Ce que je comprends de la vie en société : après avoir examiné les civils, la manière dont ils se comportent, dont ils se parlent, dont ils se regardent, j'en déduis qu'ils ne sont pas là pour voir, mais plutôt pour être vus. Ils prêtent attention à la façon dont ils rient, dont ils tiennent leur verre. Ils ne s'écoutent pas vraiment les uns les autres et se répondent le plus possible par un mot fin qui, d'après leur stratégie, émerveillera les autres. Les discours qu'ils échangent restent subjectifs et ne contiennent généralement aucune information utile. Ce sont des jugements de valeurs souvent critiques au sujet de jeux vidéos, de compétitions sportives, de leurs enseignants ou de leurs parents. Capter l'attention de l'auditoire, surtout de sexe opposé, est manifestement leur objectif prioritaire.
Il y a des certitudes auxquelles on s'accroche.
Plus je lis, plus j'ai soif de mots. Plus je lis, plus je me sens grandir. Plus je lis, moins je distingue les phrases qui glissent sous mes yeux. Ce sont des couleurs, des émotions, des actions qui surgissent devant moi et qui me font oublier qui je suis tout en me le faisant découvrir.
- Un échec n'est jamais un échec, tu sais.
- Quoi ?
- Il peut y avoir des dommages, des blessures, mais une bataille perdue t'aide à gagner la guerre. Tu as essayé, ça n'a pas marché : maintenant, tu as des pistes d'amélioration pour réussir la mission suivante. Tu vas rectifier ta stratégie pour conquérir la prochaine fille.
- Et si je me plante encore ?
- Eh bien, cet échec te permettra de peaufiner un nouveau plan d'action, jusqu'à ce que ça fonctionne.