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Critique de isabellelemest


Stefano Benni, anarchiste, poète et satiriste, a écrit une oeuvre romanesque d'une grande originalité, chacun de ses livres est une nouvelle surprise et récompense le lecteur qui a fait confiance au maestro.
Cet opus de 1992 pourrait être déjà daté... Il n'en est rien. Car il s'agit d'un championnat du monde de foot, ou plus exactement d'un contre-mondial, les joueurs étant des enfants pauvres venus de lointaines contrées jusqu'en Gladonie - un pays imaginaire qui figure l'Italie - pour disputer cette épreuve de "foot de rue" dont les réglements diffèrent entièrement du sport traditionnel. Parmi eux, cinq orphelins évadés du pensionnat des frères "Zopilotes", l'orphelinat le plus triste et le plus sévère de Gladonie. On ne révèlera pas les mille et unes péripéties, aussi imprévisibles que pleines de fantaisie, qui attendent nos héros.
À mi-chemin entre satire virulente du berlusconisme et des maux qui gangrènent l'Italie, et création poétique nourrie de l'imagination la plus débridée, cette fresque tendre et mordante à la fois met en scène l'opposition entre un monde qui ignore les compromissions, celui des enfants, de la solidarité et de l'enthousiasme, et celui des médias tout puissants, où tout s'achète et se vend, où toute valeur est frelatée. Sur eux règne le transparent "Egoarque" Mussolardi, qui du haut de son "polycoptère" survole et surveille le pays pour mieux l'abêtir et l'asservir. Il y a du Prévert dans cette confrontation entre les purs, ceux d'en bas, les enfants de la misère, et ce roi apparemment tout puissant, ridicule et odieux, qui rappelle le Roi et l'Oiseau, le dessin animé mythique de Paul Grimault (et bien sûr Prévert).
Mais ce qui donne tout son prix au roman est l'inventivité déjantée et l'extraordinaire fantaisie, les exagérations épiques et l'outrance hyperbolique avec lesquelles Benni crée un monde imaginaire qui reflète pourtant, comme sous une loupe grossissante, tous les problèmes de l'Italie réelle. Il y a des morceaux de bravoure, comme l'évocation rabelaisienne de la côté adriatique, défigurée par l'exploitation balnéaire et certaines pages sont proprement désopilantes, il serait difficile de les citer toutes.
Toutefois le propos se fait plus grave car cette lutte entre la pureté d'une part, et l'argent, le pouvoir, la bêtise et la violence, ne peut que mal finir... Pessimisme ou clairvoyance ? L'auteur laisse malgré tout ouverte la porte de l'espoir.
Excellente traduction de Marguerite Pozzoli.
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