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Critique de gerardmuller


Journal d'un curé de campagne
Georges Bernanos
Grand Prix du roman de l'Académie Française
Ce roman publié en 1938 et considéré comme le plus émouvant de Bernanos, décrit l'existence discrète d'un jeune prêtre catholique dans la petite paroisse artésienne d'Ambricourt dans le nord de la France, une paroisse dévorée par l'ennui selon l'aveu du jeune prêtre.
Dans une première partie, le jeune prêtre fraîchement sorti du séminaire évoque son arrivée dans sa paroisse et ses premières expériences avec une population frappée par la pauvreté.
Puis il décrit la vie quotidienne dans sa paroisse, ses rencontres et son action en qualité d'ecclésiastique. Il a le sentiment d'échouer à remplir son devoir. Son entretien avec la comtesse du château du village est déterminant quand il parvient à la convaincre de l'existence de Dieu. Cette conversation avec la comtesse est sans aucun doute le point culminant du roman quand on sait qu'elle meurt un jour plus tard.
Peu à peu son journal lui devient indispensable, un véritable besoin :
« J'ai plus que jamais besoin de ce journal . le peu de temps que j'y consacre est le seul où je me sente quelque volonté de voir clair en moi …. je déplore sans cesse mon insuffisance ».
Il y évoque sa relation houleuse avec la fille de la comtesse, Chantal, une diablesse qui l'insupporte selon ses termes, mais : « Je ne lui fermerai pas ma porte , je ne fermerai ma porte à personne , aussi longtemps que je serai curé de cette paroisse … »

Il va vite perdre beaucoup de ses illusions :
« L'impression m'est venue tout à coup d'un effondrement des rêves, des espérances, des ambitions de ma jeunesse. »
Et puis la malveillance est toujours prête à se manifester :
« Trouvé ce matin, dans mon courrier, une lettre timbrée de Boulogne, écrite sur un mauvais papier quadrillé, tel qu'on en trouve dans les estaminets. Elle ne porte pas de signature : « Une personne bien intentionnée vous conseille de demander votre changement . »
Malgré tout c'est avec un certain zèle que le jeune prêtre assume sa fonction, malgré sa santé fragile. En effet il est torturé par de violentes douleurs à l'estomac. Et puis il est miné par son désespoir devant le manque de foi dans la population du village. Il se sait faible, inférieur, et se pense parfois touché par la folie, mais croit vivement que la grâce de Dieu passe par son sacerdoce.
Par ailleurs il semble souvent mal à l'aise face au sexe féminin, notamment devant la jeune Séraphita :
« Tandis que je lui parlais, elle m'observait avec une attention si gênante que je n'ai pu m'empêcher de rougir. Peut - être devrais - je prévenir ses parents … Mais de quoi ? »
Persévérant, il met en oeuvre toute son énergie morale et son ardent désir d'aider ses paroissiens à sortir de l'ennui qui les ronge.
Hélas il est constamment accaparé par les multiples soucis de sa vie quotidienne – dont le manque d'argent n'est pas le moindre.
Et par ailleurs souvent son manque d'autorité l'amène à commettre quelques maladresses qui lui valent des admonestations acerbes de son entourage.
La dernière partie du journal traite du séjour à Lille pour des examens médicaux et de la prise de connaissance du mal inexorable qui le ronge.
Dans ce beau et sombre roman au style remarquable et soutenu, la technique du journal fictif permet à l'auteur de décrire l'itinéraire spirituel du personnage central tel que celui - ci le perçoit, au niveau d'une humanité vécue dans l'angoisse, la souffrance, le doute. Ce texte qui n'est pas d'une lecture facile et requiert un minimum de concentration, dépasse largement la question du catholicisme et de la vie d'un curé . le héros est avant tout un idéaliste , plein d'enthousiasme , qui va se heurter , à sa hiérarchie – ce qui n'est guère étonnant – mais aussi à ses ouailles , dont il trouble les habitudes , et qui trouvent dans la réalisation de menus profits ou l'accomplissement de leurs préoccupations bassement matérielles , une sordide jouissance . Finalement on est face à un portrait assez sombre de la communauté chrétienne française annonçant la désertification des églises et la pénurie de vocations qui allait sévir dans les décennies à venir.








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