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Critique de irena_


Vuitton a longtemps été, simplement, un malletier. Je dis cela parce que Marc Jacobs en a fait une marque de mode, chose qui devrait continuer sous la houlette de Nicolas Ghesquière, récemment désigné pour lui succéder. Bref, un malletier. Qui conçoit et réalise donc des malles - certes, de légende. Jusque là, rien d'extraordinaire, un malletier qui conçoit des malles.

En fait, si, parce que ce qui nous concerne ici sur un blog culture, c'est que Gaston-Louis Vuitton, qui fut certainement un curieux personnage, a durant sa vie fait oeuvre de collectionneur d'informations concernant son idée fixe : les malles, oui - forcément. Il rassembla, à la manière d'un documentaliste avisé, coupures de presse, anecdotes, relations avec les clients les plus extravagants… À la façon d'un documentaliste consciencieux aussi, parce que Gaston-Louis n'oubliait pas de noter noms des journaux, dates de publication et de ranger par thème : malles égarées, malles sanglantes - faut-il être passionné !

Tout ceci est actuellement conservé dans les archives de la maison de luxe à Asnières. Et des archives qui dorment, c'est tout de même dommage. Pour s'en saisir, Vuitton a eu la très bonne idée d'inviter onze écrivains fort différents à s'inspirer d'un de ces témoignages pour écrire leur propre histoire de malle.
Sur le principe, j'ai trouvé que c'était là une très bonne idée : il y a toujours quelque chose de passionnant à voir comment des sensibilités artistiques fort différentes les unes des autres traitent un exercice de style.
Et c'est une grande réussite, pour cette raison-même, et puis aussi parce que, comme moi, vous serez peut-être surpris d'apprécier plus que de coutume des écrivains que vous aimez à l'ordinaire modérément - et inversement, c'est la force de ce que peut révéler la commande : un changement dans le mode opératoire de l'écrivain. Il y a aussi ceux que vous n'aimez pas, et qu'ils narrent une histoire de malle ou une autre de leur totale pure invention n'y changera évidemment rien.

Pour ma part, je dois avouer avoir été ravie comme une enfant par deux contributions : celle de David Foenkinos, qui choisit de mettre en scène le célèbre magicien Houdini, défié par Georges Vuitton à la Belle époque, et celle de Yann Moix, échange épistolaire hilarant entre Georges-Gaston Vuitton et Monsieur Prince, qui tente de lui extorquer des malles à l'oeil, pour satisfaire son patron - qui n'est autre que Sacha Guitry.
La nouvelle de Virginie Despentes m'a évidemment plu, même si je n'ai guère été étonnée de la trouver au rayon des malles sanglantes - j'aurais aimé qu'elle choisisse autre chose, mais sans doute valait-il mieux qu'elle reste sur les terrains terribles sur lesquels elle excelle.

Quelques déceptions, incarnées par un teddy bear terriblement prévisible d'Éliette Abécassis, et une Sophie Joconde de Patrick Eudeline que j'ai trouvé un peu ampoulée.

Prenant racine dans des archives que l'on devine incroyablement fournies, mais s'en détachant pour proposer des textes de tout genre, la palette des récits de nos contemporains réécrivant l'histoire de Vuitton par un petit bout de serrure de malle surprend et amuse - quand elle n'effraie pas...
Lien : http://www.vivelaroseetlelil..
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