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Critique de fanfanouche24


Quelle joie de découvrir ce 25 septembre dans ma boîte aux lettres cette nouvelle publication des éditions Réalgar [ **Je rectifie; l'éditeur précise en fin de volume ...qu' une première édition de cet ouvrage a paru en juillet 2016]

Tous mes remerciements à cette maison d'édition, que je découvre par la même occasion et à Babelio [ envoi de la dernière Masse critique]...

Découverte démultipliée, car ce roman restitue les destin de deux artistes méconnus, avec une ville centrale contrastée et omniprésente dans la narration: Saint-Etienne.Les deux artistes en question: Jean-Baptiste RAVIER, peintre novateur à l'écart des modes; et Félix THIOLLIER, industriel stéphanois dans la rubanerie et la passementerie, photographe audacieux, estimé et reconnu à son époque ! Une rencontre et une amitié vont naître entre ces deux hommes, que pourtant tout sépare : 30 ans de différence, la situation sociale...le caractère...

Le récit romancé offre le récit alterné de ces deux existences ,en parallèle. Ce roman fort "renseigné" , au demeurant, nous offre en sus, des illustrations liées aux deux artistes [dont on aurait aimé avoir des dates, lieux, précisions, complémentaires...Là, on savoure chaque oeuvre ou détail de peinture ou cliché, en devinant l'artiste... puisque chacun exerçait, en amateur, l'art de l'autre !!]

Jean-Baptiste Ravier, ours mal léché...se fichant comme de colin tampon de se faire connaître, excella dans l'art du paysage :Admirateur de Turner, de Corot, il compose par la couleur, négligeant le plus souvent les lignes, privilégiant ombres et lumières. En cela, il peut être considéré comme un des précurseurs de l'impressionnisme....

Tout est promesse dans ce livre... puisque je découvre jusqu'aux patronymes des deux artistes... L'auteur affectionne les longues phrases, les détails descriptifs. Ce qui nous vaut des reconstitutions assez truculentes de la vie quotidienne à l'époque, à Paris, mais aussi en province [dans la région de Saint-Etienne ] Jean-Noël Blanc prend plaisir à dénicher un vocabulaire choisi, pouvant nous sembler désuet, mais qui finit de planter très fidèlement le décor ...!

"Les souffrances de la peinture non plus . Parce qu'au fond, à bien y réfléchir, si tu en baves autant à l'atelier c'est parce que la direction où l'on s'acharne à te conduire n'est pas celle qui te convient .Ils ne rêvent que de scènes de genre, d'Histoire vernie et boutonnée, de grandes machineries qui vous débitent au mètre de la musculature de héros et de demi dieu "(...)

Deux destins d'artistes, qui se cherchent, s'interrogent, se remettent en question... A travers le chemin mouvementé de l'un et de l'autre, on voit à quel point la condition et la reconnaissance d'un artiste ne sont pas une mince affaire ! On est plongé dans les querelles, les modes et conventions artistiques...les remous politiques incessants, en ce 19e siècle

"(...) mais je n'irai pas jusqu'à suivre Leconte de Lisle, vous avez vu qu'il réclame l'exécution de Courbet et d'autres artistes, "l'ignoble ramassis de peintres qui l'escortent ", ce sont ses mots à lui, il vise Corot, Manet, Renoir, voyons monsieur je désapprouve ces enragés de rouges qui mettent Paris à feu et à sang mais il faut laisser les peintres en dehors de ces folies, comment pourrions-nous vivre sans les bonheurs qu'ils nous procurent ? "(p. 136)

De très intéressants questionnements sur ce tout jeune art que représente la Photographie, accompagnés de comparaisons avec cet autre, plus ancien, qu'est la peinture !...Mais ces deux artistes, chacun dans leur art, sont subjugués, avant tout, par le "Paysage"...

"L'académisme a la vie chevillée au corps. Les paysages peints ne vibrent pas. ils sentent toujours l'atelier, le savoir, la construction : des corsets qui étouffent. François -Auguste s'isole pour travailler. Son rêve le tourmente;(...) L'important est de regarder. S'immerger dans le paysage. Admirer. C'est une fringale. Elle ne se rassasie jamais. Il se goinfre de paysages, il en ingurgite à pleines ventrées." (p. 86)

D'abondants remerciements à Babelio, Masse critique, aux éditions Realgar... qui a réédité et fait partager ce roman palpitant, des plus enrichissants, sur L Histoire, et l'évolution des Arts dans ce 19e bouillonnant , dont la mise en présence de ces deux artistes des plus dignes d'intérêt!!

Une très belle prose qui nous raconte le 19e français, l'Art, les remous politiques et rebellions sociales, mais avant tout l'histoire de deux personnalités, artistes méconnus, talentueux, chacun dans leur domaine, "ours mal léchés" tous les deux, qui deviendront en dépit de leurs nombreuses différences, les meilleurs amis, l'un, l'aîné de près de 30 ans..., François-Auguste Ravier, représentant malgré ses réticences, le "maître " de l'autre !... toutefois, Félix Thiollier houspillera son ami pour qu'il fasse un effort afin de s'exposer hors de sa région, lui fera rencontrer ses connaissances artistes, et écrivains...Et une grande omission de ma part : une ville à découvrir (dont j'ignorais quasiment tout !) : Saint-Etienne , largement décrite dans ses particularismes et transformations...!!

"Aucun doute : le peintre vient de passer une étape. Il s'est donné une liberté qu'il n'avait jamais osé prendre. On dirait qu'il a saisi au col la peinture et l'a secouée jusqu'à ce qu'elle avoue. Qu'elle avoue quoi ?
Que l'exactitude n'est rien, et la sensation tout. Qu'un paysage est une émotion. Que la lumière est une danse. Que le ciel chante. Qu'il existe une musique de la peinture, et que cette musique vous emporte." (p. 180)

J'ai été chercher , regarder les clichés de Félix Thiollier, industriel, érudit, mécène, photographe, historien, archéologue... Il était, entre autres, surnommé "Le photographes de Mines "...Ses photographies
sont magnifiques, à la fois riches d'informations... et très esthétiques...A travers la poésie de ses paysages...On ressent le "Peintre" qu'il aurait tellement voulu être...En parallèle, j'ai été voir les peintures de François- Auguste Ravier...des paysages forts...originaux dans leur style !

Bravo et Merci encore à Jean-Noël Blanc d'avoir remis à l'honneur ces deux artistes complexes et passionnés que sont Ravier et Thiollier... dans un récit au rythme soutenu et non conventionnel. Une découverte singulière et enthousiasmante de cet écrivain que je lis pour la toute première fois, grâce aux éditions Réalgar, dont je vais suivre désormais les publications, avec attention....!



****voir liens : http://www.maisonravier.fr/collection-permanente/

https://www.musee-orsay.fr/fr/evenements/expositions/aux-musees/presentation-detaillee/page/1/article/felix-thiollier-33534.html?tx_ttnews%5BbackPid%5D=649&cHash=29d93ae23a

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