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Critique de lebelier


François Bon, on le sait, continue à publier les histoires et biographies d'artistes et de groupes légendaires : avant Dylan, il y eut les Rolling Stones et après il y a Led Zeppelin.
Dans le cas de Dylan, son but est de donner des éclaircissements sur l'autobiographie de Dylan (Chroniques) dans laquelle, celui-ci semble ne raconter que ce qu'il veut mais surtout ce qui contribue à créer sa légende.
Parti d'une petite ville du Minnesota, intéressé par les chansons folk et notamment celles de Woody Guthrie, Dylan monte de petits groupes avant de s'inscrire en musicologie à l'université puis de partir tenter sa chance dans les clubs folk newyorkais. Partout où il ira, il semble qu'il se crée un personnage, un peu comme le souligne F. Bon comme Bardamu était le double de Céline, Bob Dylan sera celui de Robert Zimmerman. A l'instar de Rimbaud -« je est un autre ». Par exemple, il cultive son côté « clochard céleste » prétendant être orphelin à son arrivée à New York alors que ses parents sont des commerçants prospères d'un magasin d'électroménager.
Quand Dylan crée, c'est toujours avec cette légère distorsion de la réalité, cet arrangement avec sa vie qui pourrait être perçue comme une série de masques, presque comme une oeuvre d'art. Paradoxalement, sa musique ne souffre que de peu de prises et d'over dubs (rajouts d'instruments ou de voix après –coup), ce qui déroute beaucoup les musiciens professionnels qui jouent avec lui : peu d'indications, suivre la main du maître sur la guitare ; deux prises maximum. En fait le personnage Dylan n'est jamais là où on l'attend : pour l'avoir vu en concert, on sait qu'on ne va pas reconnaître les musiques et les chants, qu'il ne va pas s'adresser au public sauf pour présenter ses musiciens. Il en va de même sur ses albums : après avoir été propulsé dans les premières places grâce à la scène folk qui lui fera rencontrer Joan Baez, il va –selon certains puristes – la « trahir » en électrifiant les instruments. Encore maintenant, on en parle et je me souviens avoir lu dans une encyclopédie que Bob Dylan avait dénaturé le folk en rajoutant des guitares électriques, ce que François Bon appelle le « Dylan » d'avant 1966, bascule au festival de Newport où l'on n'a pas le temps d'enlever les amplis du groupe précédent, Dylan vient avec une guitare qu'il branche alors qu'on attendait le « hobo » avec sa guitare acoustique. de même, de nos jours il n'est plus guère à la guitare mais au piano ou à l'orgue et se présente de profil au public. Jamais où on l'attend.
Pourtant, quand il ne « joue » pas à Bob Dylan, Robert Zimmerman, c'est monsieur tout-le-monde qui rentre dans sa petite ville de Duluth au milieu des années soixante où personne ne connaît son succès, c'est un membre de la famille comme un autre ; c'est aussi ce personnage victime de son image et qui se cache des curieux de toutes sortes en achetant maison sur maison, avec de grands parcs inaccessibles, jusqu'à posséder 15 maisons dont une espèce de château où François Bon devine sa grande solitude. Enfin, c'est un personnage constamment en quête de lui-même, ni tout-à-fait poète ni tout-à-fait rock star mais à la fois les deux, Dylan est présenté comme un paradoxe vivant.
Reste une biographie très agréable à lire en ce sens où l'auteur se pose encore des questions, notamment en recoupant témoignages et biographies , possède une érudition évidente sur les courants et la musique de cette époque, capable de citer types et marques de guitares ainsi que les accordages et les accords, car c'est aussi cette culture qui intéresse le lecteur ; les grands noms du folk – j'avoue en avoir appris beaucoup –jusqu'aux clubs newyorkais où se croisent les stars du passé, du présent et de demain. de même, sans en faire une analyse universitaire et détaillée, il se réfère à telle ou telle chanson pour établir la correspondance, les échos qu'elle pourrait susciter pour illustrer son propos, quelques bribes de paroles –traduites un peu légèrement parfois, mais qu'importe – et le nom de quelques musiciens qu'on ne choisit pas par hasard. Il y a toujours mise en scène du personnage mis en abyme dans ces chansons.
François Bon sait faire de la vie des célébrités majeures du rock et du folk, des romans à part entière rien que dans la chronologie des albums et dans l'évolution de son personnage ambivalent. Personne ne comprend Dylan, à commencer par lui-même ; et puis pourquoi le faudrait-il ? L'énigme le rend plus vivant.
Une lecture passionnante.
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