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Critique de GeraldineB


Ce deux février, Georges Bonnet accompagne son épouse à sa nouvelle demeure, une résidence pour personnes âgées dépendantes. de petits oublis en longues absences, le diagnostic est tombé il y a six ans, Suzanne est atteinte de la maladie à corps de Lewy. C'est une variante de la maladie d'Alzheimer, plus cruelle encore, avec de fréquents moments d'agressivité et des délires paranoïaques. Pendant six ans, Georges Bonnet fut l'aidant et l'aimant de Suzanne. Inlassablement, il tenta de la ramener à lui, de la ramener à elle. Il fut sa mémoire et sa parole. Mais aujourd'hui Suzanne est trop loin. Les mots l'ont quittée. Elle est entrée dans sa nuit.

"Elle ne sait ni le jour, ni le mois, ni l'année, où nous sommes.
Sa montre ne quitte plus le tiroir de sa table de chevet,
car l'heure est sans importance.

Restent des moments de tendresse. Je lui dis que je l'aime. Elle répond : " Moi aussi ".
Nous sommes soixante-trois ans plus tôt, et nous allons nous marier.

On retrouve le ciel, et un peu de frémissement sans le temps, avec l'aide du jardin.

L'ennui n'existe pas.
Elle n'a ni regrets, ni espoirs.
L'instant est fait d'un petit rien."

Georges Bonnet passera dorénavant tous ses après-midis auprès de son épouse. Peu à peu il apprendra à se contenter de presque rien, d'un geste, d'un simple regard. Il apprendra à aimer le silence. Soixante ans d'amour, de complicité, de souvenirs partagés et puis la maladie qui efface tout, qui emporte l'autre à la dérive. L'autre est là mais ce n'est plus vraiment lui. Il est là mais il vous manque. Et quand les mots ne peuvent plus être dits, ne sont même plus compris, il reste la tendresse, ce langage des premiers instants.

"Entre deux mots la nuit" est fait de cette tendresse-là, qui ne sait plus si elle est amoureuse ou maternelle. Fragments plus que récit, presque poèmes, les textes retracent pour nous le lent effacement de Suzanne avec une infinie douceur. Car il n'y a plus de colère chez Georges Bonnet, plus de questions mais seulement de l'amour, un amour si grand qu'il permet de laisser partir l'autre.



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