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Critique de kuroineko


J'ai commencé Chroniques des Ombres de Pierre Bordage avec pas mal de réserve. Ma précédente lecture de cet auteur, Les Dames Blanches, m'avait en effet laissé un ressenti assez mitigé

Dans celui-ci, un petit temps d'adaptation est nécessaire pour s'y retrouver dans le vocabulaire particulier au monde post-apocalyptique créé. Ainsi, fouineurs, nanoneuros, horcites, et autres, finissent par faire sens. Idem pour l'organisation de notre bonne vieille Terre, dévastée plusieurs siècles en arrière, par la Grande Guerre. Non, pas celle des Poilus et de l'armistice du 11 novembre. Une guerre nucléaire qui manqua de peu d'éradiquer toute forme de vie, notamment humaine, sur la planète. Les survivants finirent par se diviser en deux camps. Ceux des cités unifiées (comme NyLoPa), vivants à l'abri de filtres écologiques et de barrières protectrices, tous équipés d'une biopuce d'identification. Ceux hors cités (les fameux horcites donc). Ceux-ci ont dû s'adapter aux conditions catastrophiques (radiations, pollutions, dégénérescences ...). Certains vivent en clans plus ou moins stables, d'autres sont retournés à l'état sauvage. Tous, hormi le clan des guérisseurs, semblent convaincus que la loi du plus fort est toujours la meilleure. D'où un monde violent, où l'on tue, viole, pille et réduit en esclavage tout ce qui paraît plus faible. Confiance et respect sont des mots bannis du vocabulaire.

Voilà pour le décor. Tout va bien dans le "meilleur" des mondes, si ce n'est que des meurtres de masse surviennent dans les cités, faisant plusieurs centaines de victimes à chaque fois, sans laisser la moindre trace, le moindre indice. Ganesh Parvati, nouvelle recrue chez les fouineurs et dotés d'une biopuce avec intelligence artificielle qui lui donne accès à toutes sortes de données (un des outils de travail des fouineurs avec leur Taz), enquête avec son binôme sur ces mystérieuses morts.

Les horcites, quant à eux, voient arriver sur eux d'étranges assassins qui éradiquent les clans les uns après les autres.
Naja, une jeune femme, survivante du massacre, se retrouve à faire route avec Deux-Lunes, un guérisseur pacifique qui lui a sauvé la vie.

Le pavé de Pierre Bordage (près de 900 pages) n'est pas exempts de temps longs et aurait gagné à avoir plus de concision parfois. Les cités protégées et hautement technologiques m'ont fait pensé aux dômes dans l'excellente série de japanimation Ergo Proxy.

Technologies, corrections génétiques  (contre les rides, l'obésité, le diabète, etc) omniprésentes, intelligence artificielle d'un côté. Sauvagerie, loi du plus fort et pharmacopée végétale de l'autre. Sous-jacente à ces deux types de société reste la question de l'humanité. En quoi consiste-t-elle? Quand se perd-elle ou disparait-elle? Cette interrogation est le courant qui parcourt l'intégralité du ro man sous tous ses épiphénomènes.
Tout au long de ma lecture me revenaient les propos du paléanthropologue Pascal Picq dans son dernier essai le nouvel âge de l'humanité sur les humains augmentés, le posthumanisme, etc.
Le personnage de Deux-Lunes, en tant que guérisseur, apparaît comme la conscience du monde et un des derniers remparts de l'humanisme. Sa connaissance des simples s'allie à une philosophie acquise grâce à son maître. Il symbolise la question sous-jacente de l'ouvrage: comment redéfinir les principes d'humanité dans un monde qui fut quasi annihilé justement par la folie et la soif de puissance de l'espèce humaine?

Chroniques des Ombres se présente à la fois comme un roman d'anticipation prenant, fort en suspense et plutôt inquiétant au vu des données actuelles sur les changements climatiques et les tensions accrues tant sur les plans nationaux qu'internationaux, et comme matière à ouvrir des axes de réflexion sur le devenir humain en rapport avec le développement sans cesse croissant des (bio)technologies. Un livre à dévorer et à méditer.
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