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Critique de Musa_aka_Cthulie


Ce n'est qu'il y a quelques années que j'ai appris que le film Un dimanche à la campagne, de Bertrand Tavernier, était une adaptation d'un roman de Pierre Bost - auteur que je ne connaissais absolument pas. J'ai un faible pour ce film, et maintenant pour le livre, mais ce sont deux objets bien distincts, Tavernier ayant tiré l'histoire et les personnages dans des directions qui ne sont pas forcément celles prises par Pierre Bost. Ainsi, Monsieur Ladmiral, attachant dans le film, ne l'est guère dans le roman, et n'a pas vocation à l'être.


Pas d'intrigue à proprement dit pour ce roman d'ambiance qui se déroule dans la première moitié du XXème siècle, et où un viel homme de 76 ans, vivant à la campagne avec une domestique dans sa maison située pas très loin de Paris, reçoit très régulièrement la visite de son fils Gonzague le dimanche, tandis que sa fille Irène, sa préférée, ne vient que de temps à autre en coup de vent. Voici qu'on nous dévoile un de ces dimanches, où non seulement Gonzague est venu, comme à son habitude, en train depuis Paris avec femme et enfants, mais où Irène montre elle aussi le bout de son nez.


Tout le roman explore les sentiments qui taraudent ces trois personnages - la femme de Gonzague ne comptant pas aux yeux de Monsieur Ladmiral, les enfants et la domestique guère plus. Leurs sentiments sont mêlés de tendresse, de jalousie, d'admiration, d'agacement, de regrets, de chagrin. C'est un triangle familial au lieu d'un triangle amoureux, mais les enjeux sont les mêmes. Gonzague ne peut s'empêcher, n'a jamais pu s'empêcher d'admirer son père, et c'est justement ce qui le tient à l'écart de son père, qui ne veut pas de cette admiration. Monsieur Ladmiral ne fait pas mine de cacher sa préférence marquée pour sa fille, qu'il idolâtre presque - ou carrément -, et c'est ce qui tient Irène à l'écart de son père. Pierre Bost explicite très clairement et très simplement ces sentiments d'admiration qui suscitent en partie - en partie seulement, car ils ont aussi de la tendresse les uns pour les autres - le rejet de l'objet admiré. Irène a su échapper à un père qui l'aurait étouffée, Gonzague ne saura jamais faire son deuil de la reconnaissance qu'il attend depuis toujours de la part de son père, et qu'il attendra, on le sait, on le sent, toute sa vie durant.


C'est un roman où les rapports entre parent et enfants sont particulièrement bien scrutés, où l'on peut retrouver bien des histoires de famille. le personnage de Gonzague est, tout comme dans le film (où il était joué tout en finesse par Michel Aumont), très attachant, traînant sa tristesse en sourdine et une tendresse qui ne lui sera jamais rendue par son père. Mais le personnage d'Irène l'est également à sa manière, même si elle n'attire pas la compassion comme son frère - son personnage est d'ailleurs assez différent de la version de Tavernier. Quant à Monsieur Ladmiral... Comme je le disais en début de critique, il n'est pas attachant ; il se sait injuste, il l'assume, il est égocentrique, il est même cruel par moments. La dernière phrase du livre est d'une dureté d'autant plus frappante que tout ce petit monde évolue dans un environnement apparemment tranquille, où tout semble se dérouler en douceur. le style même de l'auteur, d'une grande sobriété, dégage volontairement cette impression de douceur qui n'est qu'apparence.
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