- [...]Vous ne devez pas vous sentir obligée de conserver la Bastide. Votre tante s'est consumée toute sa vie pour cette maison. C'était... très personnel. Il n'y a aucun flambeau à reprendre.
- Non, je sais. Je ne le vis pas de cette façon-là. En fait, Ariane m'a ouvert une porte sur... eh bien... sur la liberté.
Pour vous, mon parcours semble peut-être cohérent, mais ma famille n'y comprendra rien. Si besoin est, vous leur expliquerez que mon seul but était de retrouver le paradis perdu. Cette quête évidemment vouée à l'échec, m'a tout de même fait tenir debout pendant plus d'un demi-siècle.
Savoir se contenter de ce qu’on a est une vertu.
Sa formation et son expérience de vétérinaire lui avaient appris que les animaux éprouvent des sentiments purement affectifs comme la joie, la tristesse ou l'amour, et qu'ils comprennent la mort, même s'ils préfèrent le plus souvent l'ignorer et s'en éloigner.
Ce fut quelques mois plus tard qu'il tomba malade. Je me souviens qu'au début je n'étais pas très inquiète. On nous rebat les oreilles avec les progrès de la science, et nous avions les moyens de consulter les meilleurs spécialistes. Néanmoins, il s'agissait d'un cancer et nous nous préparions à une bataille sans merci contre le "crabe".
"Se préparer" ? Ah, la pompeuse formule toute faite, empreinte d'un optimisme délirant ! Personne ne sera jamais prêt à voir s'approcher la mort à si grand pas, ni à supporter en l'attendant des traitements dégradants qui vous laissent aussi faible, chauve et nauséeux qu'un nouveau-né. Non, nous n'étions pas du tout prêts à subir l'artillerie lourde de la médecine impuissante qui, bien que vous ayant condamné sans vous laisser d'espoir, trouve judicieux de vous torturer jusqu'au dernier instant. Car à cette époque, les doctes praticiens n'administraient de la morphine que lorsqu'ils "baissaient les bras".
A une époque, on ne dissimulait pas la mort, on se recueillait devant elle, on veillait les corps. Maintenant, on les fait disparaître au plus vite, ou bien on les maquille pour leur donner "bonne mine". La mort fait peur, on l'occulte, on l'escamote, quelle idiotie ! Nous redeviendrons poussière, c'est une de nos rares certitudes à tous.
La fête était finie depuis longtemps, les lampions éteints et ma jeunesse enfuie, mais j'étais de nouveau chez moi. Chez moi,. Ma terre, mes murs, mon identité, le petit morceau d'horizon qui m'appartient.
Chapitre I
Comme les choses prennent ou perdent de l'importance avec le temps!
Pour vous, mon parcours semble peut-être cohérent, mais ma famille n'y comprendra rien. Si besoin est, vous leur expliquerez que mon seul but était de retrouver le paradis perdu. Cette quête évidemment vouée à l'échec, m'a tout de même fait tenir debout pendant plus d'un demi-siècle.
" Je ne m'effacerai pas. Pas cette fois ! "
L'avait-elle souvent fait dans le passé ? Ils prenaient les décisions ensemble, du moins l'avait-elle cru, mais en réalité les choix de Paul passaient tout naturellement en premier.