L’adulte se sent impuissant devant le phénomène jeunesse. Le policier aussi sans doute, mais il a les moyens, lui, d’opérer le transfert de son impuissance: alors il dénonce, il juge, il arrête, il condamne, il frappe, il harcèle, il insulte. Il se sert de sa force, de ses armes, de son autorité et de celle de la loi (même quand il la viole lui-même) pour forcer les jeunes à parler son langage à lui, le langage de tous les adultes.
Mais l’État a peur. Peur de se retrouver demain sans machine de répression pour se protéger lui-même. Alors l’État se tait, ou cède au chantage, selon le cas. Par ce biais de la peur, la police en vient à protéger un régime plus que les citoyens eux-mêmes. C’est l’engrenage. Cela peut mener très loin.
Si la police d’un pays doit et peut être un élément de sécurité et de protection pour les citoyens, il serait par contre intolérable qu’elle en vienne à appliquer la justice elle-même ou qu’elle se permette d’intervenir dans l’ordre idéologique des choses. C’est pourtant ce qui menace de se produire si l’État n’adopte pas immédiatement envers ses corps policiers une attitude très ferme.
S'embarquer. Sans protéger ses arrières. Courir tous les risques. Pour le défi. Pour le plaisir, surtout celui qui permet d'aller plus loin avec quelqu'un plutôt que nulle part avec tout le monde.
Être tendre, n'est-ce pas aussi tendre vers ?
On se plaint constamment du manque de contact réel entre les hommes mais, si déplaisante soit la chose, il faut bien accepter une évidence, presque tragique : la plupart des gens n'ont rien à dire, la plupart des gens qui ont quelque chose à dire ne savent pas le dire, la plupart des gens ne veulent rien entendre de ce que les autres ont à dire, la plupart des gens se fichent royalement de ce qui peut se passer en dehors de leur petit monde à eux, la plupart des gens ont tant de choses à cacher qu'ils préfèrent ne communiquer avec personne de peur d'être démasqués.
Je ne crois pas exagérer en affirmant que les journaux, les magazines, la radio, la télévision affectent l'esprit humain exactement de la même manière que le font les drogues mineures. Le pot et le hash annihilent - du moins temporairement - l'esprit de synthèse pour lui substituer un processus linéaire qui ne permet pas le retour en arrière, qui procède par flashes consécutifs, sans lien les uns avec les autres, et qui, en conséquence, fait éclater l'esprit en autant de petites cases indépendantes qui se suffisent à elles-mêmes avant de mourir d'inanition.
Le plaisir de la langue, c'est de pouvoir la parler sans effort. Or, quand on se refuse au départ l'effort de l'apprendre, on se condamne à parler avec effort toute sa vie.
L'homogénéisation stérilise. C'est la somme des cultures et des langues qui fait l'humanité.
C'est la réussite qui permet de mesurer le degré véritable de ses compétences et de ses mérites. La confiance en soi est faite d'humilité. C'est parce que ce paradoxe est mal compris de la plupart des gens que les relations de confiance sont si difficiles.