AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Kenehan


Livre extrait du fond de ma PAL, cette seconde lecture issue de la bibliographie de Stéphane Bourgoin s'est révélée bien plus intéressante que son "Livre noir des serial killers". Cette fois, l'auteur ne s'intéresse pas directement aux tueurs en séries mais à une femme, Micki Pistorius, qui les traque.

Micki Pistorius a officié en Afrique du Sud et est notamment connue pour avoir intégré une approche psychologique dans l'investigation des crimes en série. Bien que Stéphane Bourgoin insiste sur le côté "Profileuse", Micki Pistorius n'en est pas moins lucide quant aux avantages et aux limites de cette "profession" qui fascine tant au point de nourrir régulièrement la fiction. En plus de remettre quelques points sur les "i" (l'importance de la culture, la rigidité des classifications américaines, etc.), elle revient sur quatre ou cinq cas qui ont marqué sa carrière.

Contrairement au "Livre noir des serial killers", le présent livre lève légèrement le voile sur une méthode, celle de Micki Pistorius. D'ailleurs, un des profils dont elle est l'auteure est présenté en annexe, dans son intégralité. Et, toujours à l'inverse de Stéphane Bourgoin, elle ne s'intéresse pas aux criminels emprisonnés car, comme elle le dit à plusieurs reprises, une fois le coupable en prison, ça ne la concerne plus.

Toutefois, bien que Micki Pistorius conserve un esprit critique vis-à-vis du profilage, il est à mon sens nécessaire de rester vigilant. Outre le fait que Stéphane Bourgoin entretienne le fantasme autour du profilage (le fameux "dans la tête des tueurs") au détriment d'autres techniques possibles, quelques petits points m'ont questionné.
Tout d'abord, j'ai eu un peu de mal à cerner ce que pouvait représenter le "vent" que Micki Pistorius percevait sur les scènes de crime. Elle-même a du mal à y mettre des mots dessus et se défend de tout mysticisme, privilégiant une ouverture d'esprit vers un sens, une sensibilité que la science n'expliquerait pas encore, comme beaucoup d'autres phénomènes. Reste qu'un de ses élèves au moins intervient dans l'ouvrage et que sa collègue est régulièrement mentionnée (Elmarie Myburgh) sans que jamais leur ressenti personnel soit mis en avant comme ce peut l'être pour Micki Pistorius.
De la même manière, Micki Pistorius évoque ses vies antérieures, dont l'une aurait beaucoup de sang sur les mains. Une manière supplémentaire pour elle d'expliquer sa capacité à "penser" comme les tueurs en série, à les "accueillir" en elle mais aussi d'exprimer son besoin de réparer une sorte de faute, une rédemption pour son âme. Avec de tels éléments, ce n'est plus la science mais la croyance que l'on touche du bout des doigts. Une croyance personnelle en laquelle certain(e)s se retrouveront et que d'autres rejetteront.
Enfin, il est un peu dommage que seuls les "exploits" soient mis en lumière. Régulièrement, Micki Pistorius évoque les nombreuses affaires avec lesquelles elle jongle, leur durée, etc. mais pas véritablement les impasses ou les échecs. le côté "publicitaire" du profilage est certes légèrement écorné avec les cas de Selepe et Sithole où elle a un sentiment d'inachevé car convaincue qu'un troisième homme se cache derrière les meurtres mais jamais n'apparaît un "voilà, cette fois le profilage n'a pas fonctionné". du coup, l'idée que cette méthode fonctionne à tous les coups plane tout au long du livre sans jamais être remise en question.

Au final, avec un peu moins de 300 pages, je suis bien moins resté sur ma faim qu'avec les quasi 800 pages du "Livre noir des serial killers". C'est probablement parce que Micky Pistorius est une psychologue qu'enfin on a droit à un minimum d'analyse des faits (bien que certains lui reprocheront certainement son approche psychanalytique), à une prise de recul vis-à-vis du discours des tueurs en séries et à une critique (bienveillante) du profiling. Autrement dit, tous les points que je reprochais à Stéphane Bourgoin dans son ouvrage : son absence d'analyse, sa tendance à prendre pour argent comptant ce que lui confie les criminels (quid des enjeux sous-jacents ? de la sincérité ? de la jouissance ?), et peut-être son manque d'introspection (encore qu'apparemment son ouvrage "Mes conversations avec les tueurs" viendrait combler cette lacune, à voir…).

Challenge MULTI-DÉFIS 2018 : Un livre avec un métier dans le titre
Commenter  J’apprécie          20



Ont apprécié cette critique (2)voir plus




{* *}