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Critique de Kirzy


1917. L'inspecteur Matthias Lavau doit enquêter sur l'assassinat sauvage d'un villageois retrouvé la gorge tranchée dans la cave d'une habitante d'un village bourguignon. le mort étant haï de tous car profondément détestable, les suspects sont légion.

Bon, on va y aller direct, le bandeau est catastrophique en positionnant ce polar « entre Pierre Lemaitre et Fred Vargas ». les références mettent forcément en appétit mais sont beaucoup trop lourdes pour ce premier roman, et surtout complètement à côté de la plaque. Il n'y a rien de la verve d'un Lemaitre ou d'une Vargas, rien non plus de leur univers. Comparaisons d'autant plus écrasantes que le roman en lui-même est pas mal du tout et, sans être inoubliable, fait passer un bon moment au lecteur.

L'enquête en elle-même est menée sur un rythme rapide empli de rebondissement, ce qui permet à l'intrigue de se ramifier autour des sombres secrets entrelacés du village et de ses habitants, remontant dans leur passé commun. On sort très peu du huis clos du village avec le couvent des Ursulines comme épicentre de l'intrigue et générateur d'une ambiance inquiétante très immersive, la majorité des villageois, enquêteur compris, étant des orphelins ayant grandi auprès de soeurs. Comme si le couvent, presque un personnage à part entière possédait un pouvoir maléfique empêchant ses anciens pensionnaires de découvrir le monde en les retenant dans un orbite carcéral :

«  A mesure qu'elle s'éloignait de l'enceinte du couvent, son souffle s'accélérait et la pression augmentait sur son thorax, comme si le Clos voulait la retenir, la garder douillettement entre ses vieux murs. Les pierres soufflaient son nom, l'odeur de camphre qui imprégnait tout le linge lui chatouillait les narines. »

A la complexité de l'enquête pour remonter aux racines du mal, répond la complexité des deux personnages principaux, bien caractérisés, très intrigants car ambiguës:

- l'inspecteur Lavau ( dont on découvre dans le prologue comment il s'est retrouvé orphelin aux Ursulines, retrouvé en plein hiver dans la forêt voisine, les pieds dans la neige ) formé par le célèbre Alphonse Bertillon, inventeur de l'anthropométrie judiciaire : mémoire phénoménale lui permettant d'apprendre par coeur des milliers de fiches issues du bertillonnage, talent de physionomiste mais que l'on sent dominer par des forces souterraines qui l'éloignent de l'objectivité

- son assistante Esther Louve, mystérieuse au possible, une force qui avance en parallèle de l'enquête et dont on découvrira les ressorts profonds de sa motivation à résoudre l'enquête, protégée de loin par un loup qui semble être un gardien du village.

Si les personnages, principaux et secondaires, ont parfaitement accompagné ma lecture, j'ai été quelque peu perturbée dans mon avancée par la mise en place du cadre temporel. L'enquête se déroule en 1917 mais jamais je n'ai eu la sensation d'y être.

Il y a bien quelques références à la Première guerre mondiale, mais bien trop pauvres pour être convaincantes et participer pleinement au scénario. Impossible de contrôler l'impression d'être au XVIIème siècle voire avant, au Moyen-Age. La faute à la toponymie choisie par l'autrice : le village Haut-de-Coeur, le château de Nobles-Pierre, le comte Maison-Rouge. La faute à la présence, presque surnaturelle des loups dans la forêt. le déphasage temporel est en plus accentué par des anachronismes très présents : le loup surnommé Blue au fin fond de la Bourgogne du début du XXème siècle, l'assassiné appelé par ses initiales TS, des dialogues qui sonnent un peu trop modernes par les vocables utilisés, ainsi que la liberté dont jouit la jeune Esther Louve en tant que légiste à une époque tout de même très sexiste.

Malgré ces dernières réserves, je serais ravie de retrouver Matthias et Esther sur une prochaine enquête, on sent qu'Audrey Brière est loin d'avoir épuisé leur binôme ni qu'elle a fini d'explorer les parts d'ombre de leur personnalité.

Lu dans le cadre d'une Masse critique privilégiée Babelio





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