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Critique de le_Bison


Alors que le soleil burine la plaine balayée par le vent chaud, je me poste droit devant les barbelés de l'ESMA. le regard qui me porte au loin, j'imagine, je sonde, j'écoute, le silence et le vent chargé de pleurs, de cris, de plaintes. Escuela Superior de Mecánica de la Armada, école militaire devenue célèbre pour avoir servi de centre de détention et de torture pendant les dictatures des années 70 et 80. Il y a cette grand-mère à côté de moi qui cherche du regard l'âme de sa fille disparue, à ses côtés son petit-fils, le héros de mon histoire.

Il est là devant moi, le regard également vers cet endroit de torture, sa mère a disparu, el hijo perdido. Il a un frère né en captivité et disparu également, du moins c'est ce que sa grand-mère prétend. Il pense aussi à sa copine Romina qui milite pour HIJOS* sans savoir réellement pourquoi. Elle est enceinte, mais partie… Alors, il erre dans les rues de Buenos Aires, à la recherche de son passé, de son frère. Il y croise une certaine Maïra, travesti dont il tombe éperdument amoureux. Elle disparaît aussi. Dans d'étranges conditions. Mystérieuse Maïra est-elle une taupe, un indic de la police militaire, son frère ? Il dérive vers un monde paranoïaque où les travestis se font massacrés…

Il n'a plus rien, plus de famille, plus de maison, plus de bagages. Direction le Sud. Bariloche. A la recherche de Maïra, dans une quête initiatique où il espère retrouver ses amours, Romina et Maïra, où il espère découvrir même sa sexualité en même temps que son passé, son frère. Devenant à son tour travesti, il fera la connaissance d'El Aléman, une brute qui n'a rien à envier sur le plan de la cruauté aux vrais allemands qui se sont réfugiés au pied de ces Alpes Argentines. D'ailleurs est-ce lui le tueur de travestis de Bariloche ?

Ce premier roman de Felix Bruzzone qui sonne comme autant d'heures sombres de l'histoire récente de l'Argentine possède des qualités indéniables, de rythme et de violence – oui je vois de la qualité dans la violence d'un roman, son côté anticonformisme probablement – et même un certain onirisme paranoïaque à suivre ce fils de disparu, tragédie argentine. La playlist associée à ce roman mélange le rock argentin à la suavité d'un chat argentin (El Gato) pour donner à l'imagination et à la fougue de cette quête une cadence encore plus effrénée. Mais entre deux pas de tango, je mets un bémol – et ne me dis pas qu'il n'y a qu'à Rio de la Plata où je fais escale que l'on ne danse que le tango. Sans savoir pourquoi. Je l'ignore, je m'interroge mais nul doute que je reviendrai vers cet auteur. D'ailleurs, j'ai son second roman, Solarium

* HIJOS : Hijos por la Identidad y la Justicia contra el Olvido y el Silencio (Enfants [de disparus] pour l'identité et la justice contre l'oubli et le silence). Cette organisation, créée en 1995, réclame le jugement des responsables, complices et bénéficiaires des exactions commises durant la dictature et la « restitution » publique des enfants nés en prison et adoptés abusivement – fait notoire de l'histoire argentine.
Lien : https://memoiresdebison.blog..
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