Oliver Burkeman s'est fait une spécialité de prendre le contrepied des préceptes les plus en vue de notre époque riche en prosélytes de tout et de n'importe quoi -- surtout n'importe quoi, cela va de soi. Dans un premier essai sobrement intitulé "The Antidote", il s'attaquait avec intelligence et efficacité aux chantres du bonheur à la force du poignet, aux afficionados du succès par la méthode Coué, bref, aux grands prêtres du "positive thinking". le sous-titre en était d'ailleurs très clair : "Happiness for people who can't stand positive thinking".
Ce nouvel opus est consacré aux gourous du "time-management" et autres grands maîtres de la productivité. L'argument de départ est fort simple : sans nier que certaines méthodes d'amélioration de la productivité soient efficaces, il observe simplement que plus nous nous révélons productifs, plus nous devons l'être, dans une course sans fin. Notre "todo-list" s'allonge d'autant plus rapidement que nous nous montrons efficaces. Cette version moderne du tonneau des Danaïdes repousse sans cesse le mirage de la parfaite maîtrise du temps et du moment où nous pourrons enfin nous consacrer à ce qui nous tient à coeur. Or, notre vie étant finie, et ne durant que quelques milliers de semaines au mieux (quatre mille environ en moyenne, semble-t-il), cette fuite en avant est par définition vouée à l'échec.
Empruntant tour à tour à la philosophie, la psychologie, la sociologie et même, pourquoi pas, à l'anecdote personnelle, il démonte les mécanismes à l'oeuvre et surtout, nous propose quelques pistes pour mieux vivre notre finitude sans pour autant sombrer dans le syndrome d'Oblomov, dans l'aquabonisme ou dans la cioranite aiguë.
Le niveau d'anglais est sans difficulté, le propos est argumenté et nuancé. J'y ai consacré une petite part de mon "capital-semaines" car j'ai pris des notes à la fin de chaque chapitre, comme je devrais le faire plus souvent, au moins pour les essais. Et puis c'est une excellente façon de muscler ma légendaire patience...