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Critique de fanfanouche24


Uzès- Mai 2004 - Relecture août 2023


Un très beau texte prodigue en contrastes !

Relecture de ce texte personnel et singulier de Calaferte, déniché il y a bien longtemps, chez un libraire d'ancien à Uzès, et à un prix soutenu...(** il existe aujourd'hui en poche / Folio)
Faisant régulièrement des rangements et tris au fil de l'année, des envies de relectures surgissent ainsi...inopinément !

J'ai bien fait...car tout en appréciant fort cet écrivain, la 1ère lecture de l'ouvrage m'avait laissé peu de souvenirs, alors que cette relecture m'a offert une nouvelle appréciation plus attentive et nuancée.

Le narrateur-auteur retrouve "sa" maison familiale au bout de 5 années d'absence; une maison chère à son coeur...liée à son enfance...et par dessus tout , la vraie prunelle de ses yeux : sa bibliothèque, SES LIVRES !

Un couple de gentils gardiens vieillissants : Clémence et Adrien, l'accueillent chaleureusement; ils ont préparé la maison...et s'en occupent depuis longtemps, comme de "son propriétaire ", semble-t-il...

Évocation de souvenirs d'enfance, des parents, d'un père très aimé, d'une mère aussi lumineuse et aimante...évocation , bien sûr, du temps qui passe, de son propre vieillissement...Alternent de somptueuses descritions de la nature, du jardin...de cette maison, " matrice rassurante "....

"Parce que l'air s'est rafraîchi, après un gros orage, le vent presque froid, il a l'impression de retrouver cette particulière atmosphère des jours d'hiver, si propice à la sérénité ; la maison calfeutrée , le bureau bien chaud, la robe de chambre épaisse, les soirées et les nuits silencieuses, le molleton de la neige, la lampe sur la table, le papier blanc, l'encre, les livres, l'ardeur close de l'esprit; ce lent et grave rassemblement sur soi."

Évocations aussi de sujets plus sombres, comme une obsession de la mort...le rejet des attachements ?!

Une sorte de goût et besoin de "Solitude" , mâtinée d'un zest de " misanthropie"...

Une chose et son contraire se côtoient : la Poésie comme des propos tranchants, la brutalité comme une extrême sensibilité
(*** l'extrait suivant, choisi, en montre un aperçu)

"Dans le taxi qui m'emmène, c 'est à Van Gogh que je pense.Non pour une raison inconnue, mais parce que le matin même j'avais feuilleté sa - Correspondance-.Et je suis ému au point d'en avoir la gorge serrée, comme chaque fois que je me remémore les épisodes désolants et nobles de cette vie exemplaire.
Cette lettre, dans laquelle il crie à son frère, non seulement sa douloureuse, sa grandiose solitude d'homme et d'artiste, comme dans toutes les autres, mais surtout qu'il a été outragé, qu'on ne le comprend pas, qu'on le rejette, qu'il n'est pas admis pour ce qu'il est.(...)

Il faut des êtres purs: qui sont les vivants sacrifices et les sauveurs de notre monde."

Le narrateur- auteur...en quête d'un impossible équilibre, obsédé par la mort, qu'elle soit celle des humains ou celle des êtres vivants, des animaux....s'obstinant dans son rejet des
" attachements", si obstiné que cela en devient " douteux" !!

Comme un " ours mal léché: , qui se réjouit toutefois d'accueillir sa petite filleule,
Clémence , pendant les vacances..., allant jusqu'à franchement se rejouir de sa présence !

Une sorte de " Journal" , " biographie spirituelle" ce texte est difficilement classable !

Parfois, une seule phrase, une seule pensée occupe la page...
Le venue et la présence de Geneviève, sa toute jeune filleule , va heureusement égayer la vieille demeure familiale...et son habitant...qui à travers cette adolescente va se projeter dans sa propre jeunesse ...

Il évoque aussi abondamment les femmes dont cette ancienne amoureuse, M, à proximité de chez lui...qui toutefois ne rentrera jamais vraiment dans L Histoire !...Elle restera un mystère et cette absente , il n'a finalement guère envie de la retrouver !

Un solitaire...qui hormis la Nature, les Livres, l'Écriture , a un mal certain avec toute vie sociale, même s'il tente de faire quelques
efforts, avec ses anciennes connaissances !

Après 5 années d'absence, il s'est ,sans le vouloir , " dépris", du lieu, et surtout des personnes,se trouvant dans la distance ( *il fait à cause de cela , quelques balourdises).En dehors de très émouvantes évocations pleines de pudeur, touchant ses parents, dont son père, homme bienveillant, être très taiseux :

"Il y a dix-sept ans mourait mon père.

(...) Il m'aimait. (...)

Seul dans la pièce bien propre, bien ordonnée, la fraîcheur du matin, sa pureté, s'infiltrant par la fenêtre entrouverte, je me suis rappelé avoir quelquefois trouvé mon père, chaque jour debout avant nous tous, à cette place même où je suis assis.Nous faisions ensemble le tour du jardin.Il aimait les arbres. Il les touchait, les flattait de la main.Il me tenait par le bras.J'avais un peu froid.L'herbe était humide.Il y avait des touffes de grands Iris mauves, qui étaient ses fleurs préférées. Nous nous attardions à les contempler. "

Le titre est fort justement choisi ,est en parfait accord avec ce texte original:

" Rosa Mystica" confond, rassemble à la fois l'amour du narrateur pour la Nature, les fleurs...la terre, vierge des petitesses humaines et d'un autre côté,sa quête spirituelle, existentielle, son bilan de vie à un.moment donné ( * la quarantaine, au demeurant !)

Une prose atypique, magnifique...à lire lentement !




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