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Critique de Pat0212


Comme tout le monde, j'ai découvert ce livre il y a des années (des décennies même!) au lycée et je le relis périodiquement. Je l'ai toujours aimé, même si ça manque d'originalité, vu qu'on le considère comme un monument de la littérature mondiale. Ces deux dernières années, j'aurai relu les trois grands romans de Camus et mes deux préférés sont toujours L'étranger et surtout La chute, dont j'aime le style plus dépouillé. La peste est plus philosophique et les réflexions du Dr Rieux sont parfois bien pesantes. Comme je viens de découvrir Aux abois, de Tristan Bernard, qui aurait inspiré le chef d'oeuvre de Camus, l'occasion était trop belle de le relire.

Comme il y a déjà des milliers, voire des dizaines de milliers d'avis sur ce livre, je me contenterai de partager quelques réflexions non essentielles. D'abord je suis frappée de constater à quel point on a la mémoire sélective, même quand on croit connaître un livre, j'avais oublié une grande partie des détails de l'histoire, même si elle est simple. Il me semble qu'à chaque nouvelle lecture (environ tous les cinq ans), je découvre une nouvelle facette de ce texte, ce qui est le propre des grands livres.

J'avais l'impression d'une grande parenté entre le texte de Tristan Bernard et celui de Camus, mais en fait le rapprochement est assez superficiel. On nous parle bien d'un meurtre gratuit qui débouche sur une condamnation à mort dans les deux romans, mais les héros sont bien différents. Les deux livres sont des plaidoyers contre la peine de mort, ce qui n'est pas si fréquent dans les années 1930/40. le système judiciaire est injuste, mais la population « le peuple français ou allemand ou chinois » en est complice, tous sont coupables et l'innocence est au placard comme dira le héros de la chute un peu plus tard. Si la justice est inhumaine, ses fonctionnaires ne font qu'obéir à un système voulu par la société dans son ensemble et c'est la société elle-même qui broie les individus, en encore plus ceux qui ne se plient pas à ses normes.

Meursault est plus coupable de n'avoir pas tenu compte des convenances lors de l'enterrement de sa mère et du début de sa liaison avec Marie que d'avoir tué l'Arabe. D'ailleurs il a agi en légitime défense puisqu'on le menaçait d'un couteau, même s'il aggrave son cas en tirant sur le cadavre à quatre reprises (un détail que j'avais complètement oublié). Dans la réalité, on aurait certainement pas condamné à mort un colon qui aurait tué un Arabe brandissant un couteau et ayant déjà blessé un autre Français, même si Raymond est loin d'être innocent non plus. Donc on est dans un roman symbolique et pas une intrigue réaliste. La problématique n'est pas le racisme systémique dont devaient certainement souffrir la population indigène face aux colons.

Ce qui frappe le plus chez Meursault, c'est évidemment son indifférence à tout et sa passivité totale, en toutes choses il laisse les autres décider pour lui. Il est une sorte de mort vivant, qui ne peut qu'être rejeté par la société qui refuse une personne aussi différente. On peut voir en lui une sorte d'autiste et heureusement la médecine a fait des progrès depuis cette époque, tout comme la place donnée aux personnes handicapées. J'aime voir dans ce roman un appel à traiter de façon humaine les personnes différentes et le refus du jugement qui ne peut qu'amener la mort, réelle ou symbolique. Dans notre société où vivent de nombreux exclus, car ils ne rentrent pas dans la norme économique ou autre, nous avons plus que jamais besoin d'entendre ce message de tolérance.

On pourrait dire évidemment des milliers de choses sur ce monument de la littérature, mais c'est ce que je retiens pour cette lecture, je sais déjà qu'il y en aura d'autres, car La chute et L'étranger sont comme des bancs sur mon chemin, j'aime m'y arrêter de temps à autre.

Lien : https://patpolar48361071.wor..
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