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Critique de lilianelafond


Démocratie = pouvoir du peuple ? N'est-ce pas une équation un peu rapide ? Professeur de philologie grecque et latine à l'université de Bari, Luciano Canfora a publié, il y a quelques années, un essai remarqué où il dénonçait le mythe de l'invention grecque de la démocratie et le discours de célébration de ce régime à travers les siècles. Avec ces dix méditations publiées dans une nouvelle collection dirigée par Jean-Claude Zylberstein, il poursuit sa critique des "systèmes parlementaires-électifs" en questionnant cette fois l'opposition scolaire entre démocratie et tyrannie.
Sa réflexion part d'une remarque du philosophe communiste italien Antonio Gramsci (1891-1937), avancée lors de la mort de Lénine en 1924 : "Tout Etat, écrivait-il, est une dictature (...) d'un petit nombre d'hommes qui, à leur tour, s'organisent autour de l'un d'entre eux." Canfora entend montrer que cette phrase s'applique parfaitement aux démocraties contemporaines. Elles ne sont, selon lui, que des oligarchies où règnent des professionnels de la politique séparés du peuple, à moins que le vrai pouvoir n'y soit détenu par les puissances d'affaires. Les Parlements tendent aussi à devenir des chambres d'enregistrement des décisions du pouvoir exécutif. Enfin, de Machiavel à Max Weber, la théorie politique enseigne depuis longtemps que les Etats, même démocratiques, sont toujours fondés en définitive sur la force, même si les "élites dominantes" n'ont plus désormais besoin d'en "faire étalage". le pluralisme apparent des luttes électorales n'y change rien, comme en atteste aujourd'hui le cas italien. Dans ce cas extrême, le "monopole de la parole" par Berlusconi a permis, selon Canfora, l'avènement d'une "nouvelle forme de fascisme" d'autant plus "originale et sophistiquée" qu'elle repose, comme dans toute démocratie, sur le théâtre du consensus.

D'Hipparque et César à Napoléon, Mussolini ou Staline, Canfora évoque aussi plusieurs figures de tyrans de l'Antiquité et de chefs politiques contemporains. Il suggère qu'il existe des tyrannies plus démocratiques que d'autres. Ici encore, les frontières se brouillent entre régimes. Aussi, plutôt que d'opposer tyrannies et démocraties, il vaut mieux, selon l'auteur, apprendre à distinguer entre diverses formes d'oligarchies. Un ordre politique moins hypocrite que ne le sont les démocraties actuelles ne pourrait advenir, conclut-il, que si les classes dirigeantes ne croient plus en leurs vertus.



Lien : http://www.lemonde.fr/livres..
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