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Critique de coco4649


 
 
Recueil dans lequel, l'auteur nous entraîne
dans son voyage avec Il, Elle, leur rencontre,
leur doute, leur rupture.

Mais alors Comment recoller le verre brisé
de l'existence ?

Le bonheur serait " champ de coquelicots. "
Patrick de Carolis se questionne sur ce dont
" nous sommes faits " et sur ce que " nous
sommes ".

Alternent ensuite des réflexions sur le
Vent, le Soleil, l'Été, le Ciel.

L'auteur, enfin, nous invite à écouter " la prière
du soleil. "


Ainsi :

" I
Il a voulu partir à son tour.
Aussi brutalement
qu'elle avait décidé de le quitter.

Un voyage de courte durée.
Un tout petit exil !

Le besoin instinctif sans doute
d'ajouter sa propre distance à un éloignement subit
d'éviter les regards de compassion.

Le temps d'amortir le choc de la rupture.
Le temps de chasser de sa mémoire
un amour qui finit comme une porte qui claque.
Gommer son image.
p.9


" Effacer tout d'elle
ses yeux, son sourire, son visage.
Jusqu'à l'insolence de sa jeunesse.

Il n'a jamais pensé qu'elle se détacherait de lui.

Insouciant son coeur de lune.
Touché son coeur de cible.
Épris son coeur de sable.

Trop confiant
il a présumé de la suite
sans suite voilà tout.
Alors partir lui aussi
sans explication.
Partir pour oublier simplement
sans fracas, sans rancoeur
sans rien sinon la douleur de l'absence.

Elle a choisi Buenos Aires. le grand large.
Lui s'est cramponné au bastingage de l'Europe.
Rome, Naples, Athènes… Vols complets.
Ce sera Budapest.
p.10


" …
Comment recoller le verre brisé de l'existence ?
Ordonnance.
Délivrance.
Le futur ne s'écrit pas couleur sépia.

Alors il quitte Buda et Pest à la fois.
Il revient à son point de départ.
Elle n'est plus là.

Perdu son coeur d'épave.
Éteint son coeur de cendre.
p.15


" Sans elle, Paris n'est plus la même ville.
Son absence est la naissance de toutes les absences.
Son départ a tout consumé.

Fragile
le bonheur est un champ de coquelicots.
Le vent, seul, est maître du tableau
qu'il défait et se recompose à sa guise.
Bourrasques et tornades servent de pinceaux.

p.16


" …
Alors il part vers le sud.
Le train est une saignée libératrice.
Il roule vers son enfance, Arles, sa ville natale.

Noué par la peur de ce présent dépeuplé
sur le quai de la gare
adossé au néant
il n'ose bouger.
Peu lui importent
le parfum d'épices dans le vent
le refrain des cigales
ou les pousses du printemps.
Adieu les échappées sauvages et les regards furtifs.
Il n'a plus le goût des saveurs interdites.
Ses pensées ankylosées n'iront pas à la rencontre
de ces coeurs tapis qui attendent patiemment
derrière les murs lisses des maisons grandes
un rameau d'olivier ou un sarment d'espérance.

L'air s'est figé.
Les arbres se sont assoupis.
p.17



" II
Tout est là, en nous.
Blotti, caché.
Tout est là, apporté par le ventre de la vie.
Tout est là pour le restant de nos jours.
Incrusté, gravé.

Tout est là qui patiente :
la moindre image, le moindre son
le fracas de nos coeurs ou les douleurs muettes
ces grains de poussière silencieusement encombrants
ces brindilles crissant sous nos pas.

Tout est là qui attend son heure.
Tout ce qui a été
innocemment ignoré

négligemment oublié
volontairement enterré.
Tout.

p.21-22


" …
Nous sommes faits de tous ces livres
qui peuplent le grenier de notre solitude.
Livres lus et relus qui s'offrent en partage
et dont la seule présence nous rassure.


Nous sommes faits de fer
de soie et de champs de coton.
p.24


" Nous sommes faits du bois de ce bateau
ancré au port qui rêve de tempêtes
de ce flux et ce reflux
de cette marée qui nous ramène et nous reprend.

Nous sommes faits de ces voyages lointains
attendus mais incertains
à la fois espérés et redoutés

Nous sommes faits de tous ces inconnus
dont nous avons croisé la route
frôlé la main sans osé la prendre
de ces hommes
de ces femmes dont nous avons partagé le lit
un temps, peut-être plus.

Nous sommes faits de ces regards
qui nous ont griffés, encornés
de ces corridas permanentes
de ces flippers meurtriers
de ces journaux de 20 heures.
p.25


" …
Nous sommes faits de ces murailles
de ces forteresses
que la moindre fissure métamorphose
en frêle châteaux de sable.

Nous sommes faits de ces déserts
de ces vallées
de ces collines
de ce bleu
de ce vert.

Nous sommes faits de ces fausses libertés
chaînes de notre vanité
socle de notre orgueil.

Nous sommes faits de ces frottements lithosphériques
de ces gouttes de pluie
de ces perles de rose.
p.26


" Nous sommes ces particules
charriées par le hasard.
p.26


" Nous sommes cette contexture d'influences
obéissant aux lois de la gravitation.

Nous sommes un aimant
une boîte, un album.

Nous sommes un podium
une vitrine, un cimetière.

Nous sommes cet échafaudage vertical
grammatical, sentimental.


Nous sommes, à chaque instant, fécondés
par le pollen de toutes nos attentes.
p.27



" III
Le soir est triste
malgré les clameurs au loin sur les Lices.
p.29


Que sont devenues ces femmes au teint de nacre
ces arches célestes
ces lucarnes de l'empyrée ?
p.30



" IV
Aujourd'hui il est seul.
De nouveau seul.
Naufragé sur ce boulevard des Lices inondé de soleil.
..

Le vent pousse vers la ville une marée humaine.
Personne ne voit ni n'entend
le cri de cet oiseau aux ailes mazoutées.
p.33


" le vent s'est tu.
Le soleil cache la réalité de toutes choses.
La violence de sa lumière transperce
la cotte de mailles des feuillages protecteurs.
Sa puissance écrase l'ombre des arbres
sur l'asphalte ramolli.
Ses rayons éperonnent la peau.

Les lèvres assoiffées
ne trouvent aucun réconfort
aux fruits desséchés.

L'été se consume dans l'indifférence.
Aucune montagne de cendres
ne permet à l'homme de toucher le ciel
bien trop haut pour lui.
p.34



" V
Prendre l'allée de pas muets qui mène aux lèvres de la nuit.

Profiter des heures brunes pour habiller sa fuite.

Regarder monter
en se sentant jugé
cette boule de verre incandescent
qu'une main d'arbres brûlés ne peut plus retenir.
Écouter ce soleil dire comme une prière :
‒ Ne déserte pas ce qu'homme tu te dois.
Ton âme ne cachera pas même un puits
où se désaltérer.
p.37



" VI
Le jour qui se lève n'est pas un jour de plus.
Il est la partie manquante de son être.

Matin nouveau.
Regard naissant.
p.39



" VII
Arles…
Lieu de régénérescence.
Vase canope de la réincarnation.
C'est là que l'on vient s'étendre et se réanimer.
Arles…
Ici on vieillit vert.
p.43



" VIII
Que sont devenus les mots
déposés au pied de sa jeunesse ?
Sur quel rivage les a-t-il égarés ?

Sur le tapis de sable mouillé
ils roulent et s'entrechoquent.
Les vagues s'en amusent.
Les mots sont autant de dés
lancés après la chance.

L'écume les efface.
La plage comme la feuille redevient blanche.
p.49


" …
Mots fatigués.
Pirogues de papier qui voguent
sur les flots d'une langue morte.
Que sont devenus les mots incandescents
qui embrasent nos coeurs ?
Armée de mots.
p.50


" Soldats de la pensée.
Atomes rebelles.
Flibustiers de la parole.

Sans eux rien n'est possible.
Ils sont la clef de voûte
de la recomposition poétique de l'homme.
p.51
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