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Critique de Sarindar


Épargnons-nous la sempiternelle référence au roman de Maurice Druon : les Rois Maudits. Il ne s'agit pas ici de roman, mais d'Histoire. Et Sophie Cassagnes-Brouquet nous livre le meilleur récit de la vie d'Isabelle de France Reine d'Angleterre (1295-1358).
Fille de Philippe IV le Bel et de Jeanne 1ère de Navarre, aux fortes personnalités, Isabelle grandit près du Louvre et au Palais de la Cité, et, jeune, comme plus âgée, elle eut à coeur de se cultiver. Son amour des livres restera toujours l'une des caractéristiques de sa personnalité.
Promise, comme la plupart des filles de sang royal, à un mariage plus que princier, elle fut jetée, le 25 janvier 1308, dans les bras d'Édouard II d'Angleterre, pour son plus grand malheur, car les penchants de son royal époux orientaient plutôt ce dernier vers les hommes. Peter Galveston et Hugh the Despenser se succéderont en effet dans les faveurs d'Édouard, et la belle Isabelle se sentira délaissée. Elle ira, vers 1325, se consoler, sinon dans les bras, du moins sur les épaules de Roger Mortimer de Wigmore (1287-1330), en exil en France parce que regardé comme un dangereux ennemi par Hugh the Despenser. Forts du soutien de la France et de celui de plusieurs barons anglais, parvinrent à rentrer en Angleterre-dernière expédition réussie partie du continent européen vers les îles anglaises depuis Guillaume le Conquérant. Ensemble, ils devaient poursuivre et finir par capturer leurs ennemis puis à s'en débarrasser en 1326 et 1327, y compris le roi, éliminé par de cruels moyens à Berkeley.

Isabelle assura la régence pendant trois ans, pendant la minorité de son fils, le futur Édouard III, en gouvernant avec Roger Mortimer. Mais elle s'attira très vite l'inimitié des Lancastre, commettant là une grave erreur, car ils lui avaient fait la courte échelle mais n'avaient pas été payés de leurs efforts en sa faveur. La provocation que constitua pour les Lancastre le fait que Mortimer osât s'intituler comte de March allait pousser ces seigneurs, jaloux, à s'armer contre le soutien de la reine. Mais durant cette confrontation, Lancastre fut contraint de s'incliner. Édouard de Kent sera à la suite de cela puni de mort sur l'ordre d'Isabelle pour s'être rebellé. Impatient de la mainmise de Mortimer sur le pouvoir auquel on lui refusait d'avoir la moindre part, Édouard III, fils d'Isabelle, qui en avait assez de ronger son frein, commença à montrer les dents. Comprenant que l'on se méfait de lui et de ceux qui lui étaient fidèles, Édouard III décida de passer à l'action en faisant preuve de personnalité et d'énergie. Il n'hésita pas à faire arrêter sa mère et Mortimer en octobre 1330. Mortimer fut condamné pour haute trahison et pendu à Tyburn le 29 novembre de la même année. Placée en résidence surveillée et plus ou moins gagnée par la folie, Isabelle retrouva rapidement fortune et considération de la part de son fils, enfin libéré de sa colère. Isabelle poussa d'ailleurs ce dernier à revendiquer la couronne de France à la mort du dernier roi capétien et à l'accession des Valois sur le trône. Il y avait à cela une raison familiale : Édouard III était par sa mère le petit-fils de Philippe le Bel. Isabelle était devenue anglaise même si elle n'oubliait d'où elle venait et il lui semblait normal que son fils fît valoir ses droits à la couronne de France. Elle trouva d'ailleurs dans sa famille anglaise bien des motifs de se réjouir, et son petit-fils Édouard de Woodstock, prince de Galles, que l'on devait plus tard appeler le Prince Noir, peut-être en raison de la couleur de son armure, devint rapidement sa coqueluche et son protégé.
Isabelle aura encore le plaisir de voir le vaincu et le prisonnier de Poitiers-Nouaillé-Maupertuis en 1356, le roi de France Jean le Bon, venir lui rendre visite et solliciter sa protection. Isabelle s'éteindra le 22 août 1358 à Hertford, entourée des soins de Jeanne, reine d'Écosse.
Si son fils donna un coup d'arrêt à ses ambitions de régente, il ne put que s'incliner devant la force de caractère d'une femme et d'une mère admirables quand il cessa de la craindre.
Il n'est pas étonnant qu'Isabelle, de par son parcours, se soit trouvée mêlée aux désaccords franco-anglais qui allaient conduire à la guerre de Cent Ans.

François Sarindar, auteur de Charles V le Sage, Dauphin, duc et régent (2019)
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