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Critique de Malaura


Portraitiste aimable, le peintre de Cour Baptiste V. a connu son heure de gloire quelques années auparavant.
Malheureusement, son époque est depuis longtemps révolue.
Aussi crée-t-il la surprise en présentant au Salon de Paris un grand Portrait de Famille. Sa femme et ses enfants y sont réunis autour de lui, vieillard désormais seul au monde et oublié de tous.
Cette toile maintes fois remaniée a les couleurs d'un autre temps, celles d'un homme qui a voué sa vie à son Art et pour qui le seul langage fût celui de la couleur...

Françoise Chandernagor est une conteuse d'exception.
Au gré de lignes précieuses et élégantes se déployant avec la finesse d'un trait de pinceau sur une toile, elle réussit à brosser brillamment le roman d'un portrait et, en historienne non moins talentueuse, fait revivre toute une époque ; celle des maîtres peintres et des teinturiers, celle des courtisans, des petits flagorneurs et des encenseurs à courbettes, celle encore des élèves peintres, des compagnons et des artisans qui oeuvraient pour les artistes de renom.
De la fin du règne de Louis XIV à la régence de Louis XV c'est toute la vie de Cour et les secrets des ateliers d'artistes qu'elle nous ressuscite dans des fragrances de parfum, dans des émanations de térébenthine ou dans les bouquets de couleurs d'une palette de peintre.
Peu à peu se dessine alors la couleur du temps qui passe et se respirent les effluves d'un passé qui a vu le peintre Baptiste V. s'enlisait dans l'oubli et se démoder. Tout comme aujourd'hui, les diktats des élégants de l'époque faisaient et défaisaient les modes, imposaient les tendances et présidaient aux destinées d'artistes d'un simple hochement de noble tête...

Les aspirations artistiques de Baptiste V., peintre consciencieux épris d'une vérité toute personnelle dans sa quête illusoire de la couleur et de la ressemblance, se verront mises à mal par l'émergence d'un autre courant artistique, un autre souffle créateur venant assombrir les teintes de ses si jolis portraits de reine…
Cependant, nulle amertume chez cet homme bon et généreux, nulle hostilité et nul griefs à l'encontre de ceux qui se sont détournés après l'avoir porté aux nues.
Seulement un coeur qui se serre, celui du lecteur, lorsque le lourd tissu tombe le jour du Salon de Paris, et dévoile un être seul, un artiste abandonné qui a offert sa vie à la peinture, à la couleur et à la cour royale.
Plume légère, sensibilité du ton, bonheur du style, force et finesse, l'auteur nous enchante et nous régale du début à la fin dans ce court roman d'une vie, aux miroitements et à la saveur des contes.
« Couleur du temps », un tableau plein de grâce et d'éclat…

« V*** fut-il un grand peintre ou un petit-maître ? Un coloriste-né ou un fabricant sans génie ? Nous n'en savons rien : la postérité n'a pas rendu son arrêt. Tout juste peut-on dire que V*** était déjà mort de son vivant : lorsqu'il disparut, sa belle époque était révolue, sa mode, démodée. »
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