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Critique de ClaireG



Une friandise, un fondant plein de délicatesse.

Que de jolis souvenirs d'enfance ont marqué Philippe Claudel lorsqu'il se rendait chez sa grand-mère après l'école ! Bien sûr, ce n'est pas banal d'avoir une grand-mère éclusière sur le canal de Dombasle. « Il y avait chaque jour sur l'eau des morceaux d'Europe qui passaient ainsi, dans les remous et tourbillons d'hélice ». Cette grand-mère généreuse qui avait toujours un litre de vin sur sa table pour le facteur, pour le cantonnier. Un portrait sépia auquel elle murmurait des mots tendres et qu'elle couvrait de baisers. Une femme jeune et pleine des promesses de la vie à qui l'amour fut arraché peu avant l'armistice de 1918.

Très vite, Philippe Claudel fait des parallèles entre ses joies d'enfant et les tableaux d'Emile Friant, Nancéien d'adoption, qui se plut à saisir la vie quotidienne, âpre et rude de cette région trimballée d'une guerre à l'autre, d'un gouvernement à l'autre.

Que vient donc faire dans l'histoire, ce peintre naturaliste au succès rapide, distingué par une médaille d'or à l'exposition universelle de Paris de 1889 ? Qui, du moment où il accepta de nombreuses commandes, perdit de sa spontanéité créatrice ? Ce n'est qu'à la toute fin qu'on l'apprend. Jeune fille, la grand-mère de l'auteur quitta sa campagne pendant la Grande Guerre pour entrer au service d'un homme riche de Nancy, à l'apogée de sa carrière. Cet homme était Emile Friant. Ce n'est en rien dévoiler un fait quelconque de la vie de la grand-mère, c'est la rendre plus attachante, plus douce, plus feutrée. Passe un petit souffle de mélancolie…

En bon Lorrain, Philippe Claudel s'est intéressé au peintre de l'école de Nancy. Les tableaux d'Emile Friant font remonter des effluves d'insouciance et de joies enfantines dans ses propres souvenirs, à cent ans d'intervalle. C'est délicat, intimiste, simple et sensible. Comme le sont ses romans. Dommage que la réédition de 2016 n'ait pas inclus les toiles dont il est question. le réalisme de Friant est touchant, proche d'un arrêt sur image. N'hésitez pas à consulter ses tableaux sur Internet. Les Buveurs, Les Canotiers de la Meurthe, Jeune Nancéienne dans un paysage de neige, La Toussaint, Les Amoureux, …

Les évocations de Philippe Claudel sont émouvantes en ce qu'elles touchent à l'enfance qui s'efface, au temps qui passe inexorablement, à la vie qu'il est bon de chérir.

J'hésite entre reprendre un délicieux bonbon à la bergamote ou un macaron. Une friandise, vous disais-je !
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