Quand les premiers colons européens sont arrivés en Australie, ils ont demandé aux Aborigènes: "A qui appartient cette terre?" Ces derniers sont restés sans réponse. Un tel concept leur était étranger: pour eux, la terre n'avait pas de propriétaire. Dans cette culture-là, les hommes appartiennent à la terre et en sont partie intégrante, comme les animaux, comme les arbres. Ni plus, ni moins.
On sait que tous les hommes contemporains, qu'ils soient tutsis ou esquimaux, en dépit de leurs nombreuses différences, sont interféconds. Il y a une extrême variété des êtres humains aujourd'hui. Et pourtant, ils composent une seule et même espèce.
- Domestiquer la nature les aurait incités à domestiquer l'homme... De ce point de vue, le néolithique serait donc une sorte de retour en arrière?
- On peut le craindre. Imaginez les hommes de cette époque: ils s'imposent en maîtres dans le monde vivant, ils domestiquent les plantes et les animaux, ils réussissent à vaincre la nature... J'ai le sentiment que cette domination les a grisés et leur a un peu tourné la tête ! Ils ont le goût de la compétition, ils se voient en vainqueurs, en conquérants. Et ils sont tentés d'appliquer cette domination à leur propre espèce.
L’objectif des religions, c'est de s'évader du quotidien et de l'utilitaire pour penser le monde et les forces qui le régissent. Sans doute perçoit-on surtout celui-ci sous son aspect cyclique : la naissance, la vie, la mort des hommes; la naissance, la vie, la mort de la plante et son renouveau au printemps suivant...
Les hommes du paléolithique ne se rendaient pas dans des cavernes obscures, difficiles d'accès, sans des raisons impératives. Si cette pratique s'est maintenue ainsi pendant tant de millénaires - plus de dix fois la durée de la religion chrétienne -, c'est grâce à un système structuré et assez rigide de transmission des connaissances, avec des rites, des mythes, des représentations du monde. Grâce à une véritable religion.
Pendant longtemps, on a cru que les Homo sapiens, appelés en Europe les Cro-Magnon, que l'on dépeignait comme des êtres nobles et évolués, étaient les plus anciens Européens, et que les Néandertaliens, ces brutes épaisses, étaient venus de contrées obscures.
Cela permettait de prétendre que l'intelligence et les capacités artistiques étaient apparues en Europe et pas ailleurs. C'était doublement faux. D'une part, on sait maintenant que ces deux populations d'humains possédaient un savoir-faire équivalent, qu'elles enterraient leurs morts avec des rituels, qu'elles utilisaient des outils élaborés et qu'elles avaient la même culture à la même époque. D'autre part, en 1988, on a daté des fossiles d'humains modernes du Proche-Orient à - 100 000 ans, et il a fallu renverser le modèle : les hommes de Cro-Magnon n'étaient pas les plus anciens habitants de l'Europe, ils venaient d'ailleurs. En ce sens, nos ancêtres étaient déjà des immigrés.