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Citations sur Oeuvre poétique, tome 1 (8)

PLUTON

On les appelle les îles de l'Archipel-qui-tousse. Respirez, respirez de la mer peu profonde qui les afflige les buées rances comme le chlore! On dit que ces eaux recouvrent un empire
qui continuerait d'exhaler l'haleine de ses morts. Regrets perdus ! On ne sait, on ne sait la couleur du ciel, ni celle du temps. Car tout est détrempé, plus ou moins poitrinaire,
arbres creux, pétales blêmes, longs vers livides aussi habiles dans les branches qu'à fouir la tourbe gluante.

Le soir, qui ne revient qu'après sept lunes, pousse dehors un brouillard encore plus malade. Il s'installe, se suspend aux bronches. Surgit alors la nuit à peau de raie, affreuse et
qui s'étale. Mieux vaut partir. Pourtant, elles sont douces au toucher, les Iles, même si elles ne sont pas belles.
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DÉCEPTION

Accoudé distrait

au bleu parfait de son éternité

un
Dieu léger rêve hésite.

Se penche sur le frémissement d'argent des olivaies qui le reconnaissent.

Les cigales sèment la limaille du silence.

Les voiles noirs des
Mères dans les mêmes rues blanches.

Ambigu sans oubli ni merci

sans pouvoir d'amour pour la trahison

la profanation de la beauté.

L'insaisissable sourire revoit l'éclaboussemcnt

d'Icare brisant le violent indigo des mers.

-
Vous aviez cru que nous voulions des holocaustes : c'était bien assez des vôtres —

Voiles noirs des prêtres
Ils célèbrent l'ignorance ici où furent tes temples.

Sous ta paume le roc a frissonné sous tes pas ont éclos des fleurs sauvages éclaté un rire vide ferraille rouillée lancée dans
Tailleurs par ton pied distrait - un détritus de plus : leur civilisation !

Puis tu disparus dans le dur feuillage
Déçu
Jeunesse à j amais cruelle et divine.

Le temps pur n'était pas revenu.

Aegiali, juin
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ARP INCOGNITA

On n'a rien trouvé de vivant par là; je veux dire rien qui se trahisse. Nulle part on ne découvre de ces fumures, de ces saletés que le règne animal, qui est
nôtre, laisse derrière soi. Rien non plus de ces orgueils ni de ces désastres dont nous sommes coutumiers. C'est une belle terre pure, minérale, baignée de lumière
et d'un vent calme. Des formes singulières s'y déplacent, s'emboîtent, s'émeuvent, s'apaisent, se séparent en silence, glissant à la surface du temps —
lourde sphère polie, obscure et paisible. Formes douces, imprévisibles, figures sans visage, sans accident, sans névrose — monde lisse, harmonie qui nous récuse. Arp
Incognita.
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Voix dans le chaos choral

Tel l'amandier qui mesure et médite le lent mûrissement de la mémoire (tout poète abrite l'âme d'un arbre) l'avancée de la noire amertume l'élan repris aux passions provisoires - ta force de refus ô terre antique ! -le cœur à l'écoute du chant que prête le temps à l'homme en quête d'origines: tel je vous imagine - vous - pur guetteur de notre périssable éternité.



Collines ocres et haute solitude

à peine altière où composer sceller

comme le peintre appose le visage

des donateurs douleur et plénitude - humer



l'offrande douce des servantes

riant d'herber les draps - odeur des simples

autrefois - enfant né aux vieilles rives -

fenêtre ouverte sur les perspectives

du passé d'où renaissent - ombre et lumière

à la fois - verbe et silence - l'autre et soi.

Veilleur et rassembleur de nos fragments

perdus dispersés usés par le fleuve

détruits par les guerres - et ne s'en émeuvent

guère les
Dieux ! - sous des cieux aux segments



portés par d'étincelantes ténèbres

selon la lente exaltation des astres

L'âme des choses à votre voix se lève

sur l'aire de l'âge et de nos désastres

- flamme pure dans la nuit de
FErôbe -

et nous parle au cœur du chaos choral.
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VÉNUS

On avance le long de strates analogues aux fibres du bois, butant, maladroits, sur des nids, des noeuds, des failles. La terre suppure une espèce de sève où ce qui s'aventure
s'englue et se fait digérer vivant. Le ciel a des couleurs violentes, fiel, fièvre pourpre. Les fleuves n'existent pas. On ne voit que des lacs, qui disparaissent le soir,
aspirés dans leur entonnoir, et que l'aube un peu hâve recrache comme des glaires au fond d'un pot. Drôles de lacs! On ne voudrait pas y tenter la brasse. Drôle de monde.
D'entre les fibres du sol, un peu partout, surgissent des psoques, des gamases, énormes, étourdiment, et qui laissent, sur leur passage, des salissures de pensées
envieuses.
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SOPHIA DU CENTAURE

Le vent est prince de ces Terres. Il ne cesse d'aller ei venir, traînant partout son manteau limpide. Il a soin de tout et ne laisse en paix ni les déchets ni les morts. Aux arbres
qu'il fréquente viennent des Livres de connaissance. On y apprend debout les raisons de la race et ses lois, la futilité qui les gouverne, l'entêtement des gènes, À
peine lues, le vent emporte leurs feuilles, sans appel. Personne ici n'a droit deux fois au savoir. Chacun naît avec son arbre, dont l'ombre s'éclaire à mesure que le sang, au
cœur de celui qui apprend, s'épaissit et s'enténèbre.

L'arbre à sec, défolié, fournit de bois les bûchers qu'avive le vent, prince de ces Terres. Le bas de son manteau balaiera la cendre des morts avec celle des mots.
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SIBIL

On a du mal à le croire : les fleurs en prennent à leur aise. Elles s'élèvent par essaims dans l'air du matin. Quelle qu'en soit l'espèce, oxynaire, orties blanches,
fleurs de courge, dahlias à bajoues, elles bondissent doucement vers des soleils pâles peu capables de nuire. On ne sait si, par principe, elles reviennent le soir à la tige
mère, ou si elles se posent au hasard sur l'une ou l'autre, vacante et dépourvue de préjugé. S'il pleut, elles se cachent, se ferment sous l'aile du toit, l'aisselle de
l'arbre. Sinon, si plat, si calme, le ciel est tapissé — odeurs, couleurs! — selon les caprices du vent.
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KÔYASAN

Très haut, très loin perché vous trouverez un peuple de pierre, un peuple gris entassé sous les cryptomères et la fougère géante. Peuple impavide et froid qui
ne se remue pas. Ou ne se remue plus. Définitif. Assis aux marches de l'infini. Qu'il se couche ou qu'il se brise, cela n'est plus de son fait. On le croirait occupé à
mâcher, puis à recracher la brume, indifférent aux désordres de ses assises et au tumulte du monde. Mais la seule voix des gongs — bulles cuivrées qui montent du
fond des années et viennent mourir ici dans le silence —, la voix des gongs parle-t-elle seulement du monde ?

On accède à leur domaine par une vallée que borne l'inutilité de lanternes vides et d'autels sans offrande. La pensée par là nourrit de grands corbeaux pouilleux.
Ils volent pour elle. Ils lui rapportent, dociles, en partage, la paille et l'écorce insanes de l'en-delà.
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