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Critique de afriqueah


Le monde de l'adolescence, cette période intermédiaire où l'impatience de devenir enfin quelqu'un est confrontée avec l'indécision quant à l'avenir et à la nécessité de temporiser, aux divers devenirs qui ne dépendent pas d'une décision quelconque, mais du hasard et des parents, , est une situation tourmentée, nous dit Colette, dans « le blé en herbe. »

C'est quoi, le blé en herbe ? c'est justement ce que vivent Phil, 16 ans et demi, et Vinca, quinze ans et demi : le moment où les épis ne sont pas mûrs, rien ne sert de les couper avant terme.
Philippe est jaloux lorsque Vinca, qu'il considère infantilement comme « à lui », plait à un homme plus vieux, et qu'elle jouit de ses compliments sur sa beauté, comme si , pleine d'insolence voluptueuse, elle devenait une idole, un tanagra…
Mais elle est trop amoureuse de lui, et s'écrase comme « une squaw »au lieu de triompher, alors, autant elle l'énervait avec son simulacre de séduction, autant elle l'horripile quand elle revient, humble et moche, une biche , une esclave, vers lui, le coq.
Et puis elle ne comprend jamais rien, elle parle comme sa mère, et elle attend que jeunesse se passe. Elle l'énerve et en même temps il ne voit qu'elle.

Passe une dame en blanc. C'est elle, garçonne des années 20, qui prend l'initiative.


Est ce une ironie de la part de Colette ? est ce même une satire, de ces adolescents qui se croient les rois, et qui font l'amour sans vraiment choisir ,l'un , avec une femme le double de son âge, l'autre, par dépit amoureux ?
Mauvaise piste, je crois, car Colette insiste sur le plaisir pris. Celui du jeune homme, avec son maitre, enfin sa maitresse masculine, qui lui apprend, quoi, le plaisir, l'art d'y arriver, l'abandon à la jouissance, et cela, même s'il est troublé de mendier les caresses, et que ses prérogatives de mâle ne soient pas reconnues.
Il ressent de l'angoisse à chuter dans l'âge adulte. Mais il y va.


Comment dire ces choses sans les dire ? c'est tout l'art de Colette, qui entoure ces premiers émois avec l'évocation de la nature bretonne, les coquillages, les graminées, les rochers, les goémons. Elle sait parfaitement qu'elle va choquer, alors, pas la peine d'en rajouter avec des détails inutiles, puisque nous comprenons. le monde de la dame en blanc, avec le ara rouge et bleu, le rouge et le blanc d'une tenture, le noir et l'or des rideaux, le rouge du melon, et le rouge de la bouche éblouissent le jeune homme ;Il lui avait apporté des chardons bleus du même bleu que les yeux de Vinca; il retire le bras qu'elle lui prend, puis redonne son bras. Tout est dit.

Comment. à notre époque, pourrions nous écrire une telle histoire ? Une femme plus âgée qui « déniaise » un adolescent, ce n'est pas très correct, non, et cela s'appelle : pédophilie.
A moins qu'il n'y ait 2 poids et 2 mesures, et que l'on ne parle de viol, de harcèlement, de non consentement, que lorsque c'est une jeune fille, et que pour les adolescents, ce serait une éducation vers le plaisir ?


Mauvaise piste, car Colette a voulu choquer, pour faire comprendre, pour faire accepter, cette situation, tout en racontant son histoire incestueuse avec le fils de son second mari, Henri de Jouvenel, dont elle divorcera en 1923 au moment d'écrire le blé en herbe, histoire qui a quand même duré 5 ans , plus donc que dans son roman.
Elle choque, et à la fois elle enchante par son écriture pudique , émotive, ouverte.
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