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Critique de elea2020


Un tout jeune adolescent, Alejandro Silva, décide de s'embarquer comme passager clandestin sur la corvette "le Baquedano", qui est un bateau école pour les mousses, et effectue son dernier voyage avant d'être démontée, vers le mythique Cap Horn et la Terre de Feu.

Bien sûr, Alejandro Silva est repéré, et le commandant de la corvette décide de le garder à bord. Il devient mousse, revêt l'uniforme de marin et fait ses classes. Les hommes de l'équipage sont rudes, parfois moqueurs (on le surnomme "trois formes" parce qu'il n'a pas reconnu des baleines lors de son premier quart à la vigie), mais il est bien encadré, et le métier lui plaît.

Il s'est donné pour but de retrouver son frère aîné qui est parti vers le Sud, et dont on n'a plus eu de nouvelles. Comment faire ? Avant de résoudre cette épineuse question, il connaîtra des histoires de fantômes en mer, grâce au vieil Escobedo, qui enchante les soirées ou travaux de couture des mousses de ses mystérieuses et frissonnantes histoires, une tempête terrifiante, une navigation au milieu des icebergs, une rencontre avec les Indiens Yaghans... Avant, qui sait ? de trouver sa voie comme marin, de même que l'était son défunt père.

C'est un court roman, et je reste bluffée par la réussite, par tout ce que l'auteur est parvenu à concentrer dans cette intrigue simple de roman d'aventure maritime, pourtant dense et ramassée. Tout y est : les passages obligés comme la tempête, l'arrivée au port sont là, ciselés à merveille, pas un mot de trop, et le souffle d'une épopée maritime, le chant de la nature, des vastes espaces, la nostalgie d'une époque sur le point de se terminer - le Baquedano n'est-il pas lui-même à voile comme à machines ?

On y tire le canon, on y salue un homme disparu en mer, on défile dans les rues des ports, on s'exerce au tir sur des icebergs, on chasse la baleine ; c'est aussi le roman d'une initiation, d'un passage à l'âge d'homme, aux choix responsables. Je n'arrive pas encore à comprendre avec quelle maîtrise Coloane a pu faire tenir tant de substance en une petite centaine de pages.

Et pas seulement ! Il trouve le moyen de défendre la nature, de présenter les Indiens comme bien plus civilisés qu'on ne croirait, il fait l'éloge d'un commandant qui est un vrai marin, et qui affronte la tempête sur le pont avec ses hommes, en ciré et en bottes. le récit n'est pas dénué d'humour, et la langue est élégante, simple comme seuls les très grands écrivains parviennent à l'écrire, épurée, stylisée, juste parfaite. Je ne m'y connais d'ailleurs pas en traduction espagnole, mais je tire mon chapeau à François Gaudry, car à aucun moment je n'ai eu l'impression de lire une traduction.

Je me suis contentée de dériver dans un état second sur les flots déchaînés du Pacifique, ou de glisser lentement sur les eaux du détroit des Magellanes, et c'était beau - j'ai encore la mémoire des embruns et des ciels infinis des côtes chiliennes... Ce roman est inépuisable, il restera sur mes étagères à une place de choix.
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