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Critique de Sando


« C'est notre dernier été tous ensemble, Pierre.»
Telle une funeste prémonition, le roman s'ouvre sur cette terrible déclaration de Bérénice à son fils aîné. Dès lors, Pierre, narrateur et témoin impuissant d'une fin annoncée, raconte la parenthèse (dés)enchantée de ces dernières vacances passées, comme chaque année, avec sa mère et son jeune frère, Orphée, sur la petite île de Sjena, terre de leurs ancêtres, perdue dans la mer Adriatique. Une île hors du temps, presque primitive, surnommée « l'île des ombres », mais sur laquelle souffle encore un vent de liberté. Une île qui semble dotée d'un étrange pouvoir, capable d'éveiller chez les siens une mélancolie enfouie, empreinte de nostalgie et de folie…

Dans son deuxième roman, Claire Conruyt revisite de manière originale le mythe d'Orphée et Eurydice, la reine de l'ombre ayant remplacée l'amante perdue, dans cette fable aux allures de tragédie grecque. Bérénice tient à merveille son rôle d'héroïne tragique, offrant le portrait d'une mère aimante mais abusive, prête à tous les sacrifices pour ses enfants mais capable de les entraîner sans concession dans sa tourmente.

Pierre, en tant qu'acteur mais aussi spectateur de cette lente descente aux enfers, rend habilement la montée progressive de la folie. La tension est croissante, palpable et l'onirisme du texte ne suffit pas toujours à en masquer l'horreur, notamment dans cette scène de chasse à l'enfant particulièrement oppressante…. Une intensité se dégage du texte, mais également un sentiment de confusion qui le rend parfois difficile à suivre… C'est beau et triste à la fois.

Les chapitres sont brefs et la plume poétique, marquée par une forte puissance évocatrice, presque incantatrice, nous place sans cesse à la limite du rêve. Il y a chez Claire Conruyt une vraie qualité littéraire. La mise en scène est soignée, l'atmosphère sombre est inquiétante à souhait, néanmoins, malgré toutes ces qualités, il m'a manqué quelque chose pour être vraiment touchée par cette histoire. Pierre, dans sa normalité, n'a pas su m'emporter dans le tourbillon de folie qui entraîne sa mère et son frère dans les méandres de leur intériorité et c'est avec une certaine distance que j'ai suivi le récit de cette jeunesse qui s'achève et de cette innocence perdue… Un roman qui m'a rappelé le superbe roman d'Olivier Bourdeaut : « En attendant Bojangles », la légèreté en moins…
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