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Critique de jeranjou


Une vraie bénédiction cette malédiction…

A chaque fois que je cherchais un roman d'Harry Crews dans une médiathèque, le bouquin me faisait toujours faux bond. Une vraie malédiction…

Pour rompre le mauvais sort, j'ai dû faire appel au père noël angevin (que je salue au passage) pour m'offrir « La malédiction du gitan » dont la couverture doit faire un sacré effet sur les femmes. Pour ma part, je préfère largement le bikini de « Fantasia chez les ploucs » mais il en faut pour tous les goûts !

Et puis, dès lors que l'on plonge dans le roman d'Harry Crews, on comprend mieux pourquoi le corps bodybuildé de la couverture se prête parfaitement à l'illustration du récit.

Direction Tampa en Floride dans une salle de sport ou de remise en forme, le Fireman's Gym où se côtoient volontiers boxeurs, culturistes ou sportifs amateurs.

Gérant le lieu d'une poigne de fer, al Molarski, ancien lutteur âgé de soixante-dix, a recueilli un enfant abandonné par ses parents qu'il appellera Marvin Molar. Et il faut avouer que Marvin a joué de malchance dans sa vie.

Un corps de cinquante centimètres dont les jambes atrophiées l'oblige à marcher sur les mains. Qui plus est, déjà privé de l'usage de la parole à la naissance, Marvin parachève son lourd handicap par une surdité survenue à la suite d'un accident de numéro de cirque.

Et oui ! Pour épater la galerie et surtout pour survivre, Marvin réalise des prouesses acrobatiques en pivotant de tout son poids sur un seul doigt, tout ceci grâce à son entrainement quotidien sous l'oeil attentif de son coach paternaliste Al.

Jusqu'au jour où Hester, la copine de Marvin, une jeune femme aux jambes majestueuses et au corps de rêve, débarque dans cet univers jusque là réservé aux hommes…

Ecrit à la première personne et avec un tel réalisme, sous le personnage cabossé et attendrissant de Marvin, je n'ai pas été étonné d'apprendre qu'Harry Crews avait perdu son père à l'âge de deux ans, vécu des moments difficiles avec un beau-père alcoolique et violent et plus surprenant encore, avoir subi une paralysie des jambes, pendant quelques mois dans son enfance (1).

Dans la lignée des grands romans dont une femme fatale déclenche un véritable ouragan, j'ai retrouvé l'écriture écorchée et chaotique d' «une poire pour la soif » de Ross, les personnages cabossés de « Nuit de fureur » de Thompson ou encore l'incertitude et la tension palpable autour d'un couple jusqu'à la fin du roman de « La fille des Collines » de Williams.

Tout simplement, j'ai adoré ce roman d'une force incroyable, à la fois tendre et cruel, souvent drôle mais dramatique. Bref, un roman noir lumineux…

En guise de conclusion, méditez sur l'étrange malédiction du gitan d'origine américo-hispanisante: « Trouve-toi un con à ta taille et tu ne seras plus jamais le même » apparemment bien différente de l'origine européenne cette expression (2).



(1) le récit de son enfance en Géorgie A Childhood : The Biography of a Place, (Des Mules et des hommes), est considéré par l'écrivain James Crumley comme « peut-être le meilleur livre de la littérature américaine contemporaine »


(2) Pendant plusieurs années, le Derby d'Epsom, une course de chevaux en Angleterre, fit l'objet d'une malédiction. L'histoire veut que l'année marquant le tournant du siècle, une gitane du nom de Lee prédit que le cheval "Blew Gown" devait remporter la course.

Elle en était à tel point convaincue, qu'elle inscrivit sa prédiction sur un morceau de papier. Mais lorsque qu'on lui fit remarquer que le cheval s'appelait en réalité "Blue Gown", sans le w dans le premier mot, la gitane fut prise d'une rage folle de peur que l'on se moque d'elle.

D'ou sa malédiction: tant qu'elle vivrait, aucun cheval dont le nom comprendrait un w ne pourrait gagner cette course, et aussi étrange que cela puisse paraître, c'est ce qui se produisit. Lorsque la gitane mourut en 1934, sa famille paria sur un cheval nommé "Windsor Lad" qui l'emporta à 7 contre 1.
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