AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Andromeda06


Pour venir à bout de son projet, qu'était celui de réaliser un document-fiction en bandes dessinées, Pascal Croci aura eu besoin de cinq années. Cinq années pendant lesquelles il a interviewé plusieurs témoins/survivants/rescapés du camp d'Auschwitz-Birkenau. Cinq années pendant lesquelles il a réalisé des recherches minutieuses. Cinq années pendant lesquelles il a travaillé sur le graphisme de l'histoire qu'il voulait nous présenter. le résultat, sinon splendide (impossible d'utiliser ce terme pour évoquer ce pan de l'Histoire) est en tout cas efficace et nécessaire.

Pascal Croci s'est donc basé sur les différents témoignages qu'il a récoltés pour pouvoir nous raconter l'histoire de Kazik et Cessia, qui débute et se termine en 1993, en ex-Yougoslavie. le parallèle fait entre les conflits de cette période et ceux cinquante ans plus tôt est là comme une évidence, un rappel... Accusés tous deux de trahison politique, Kazik et Cessia n'ont pas oublié, se rappellent et nous racontent ce qu'ils ont vécu dans le camp d'extermination d'Auschwitz il y a un demi-siècle de ça...

Kazik, séparé de sa femme et sa fille à leur arrivée à Auschwitz, se porte "volontaire" pour faire partie des Somderkommando. Il sait que sa femme n'a pas survécu à la haine des nazis, mais il y voit une chance de revoir une dernière fois Ann, sa fille. Pour rappel, les Somderkommando sont un commando spécial formé uniquement de juifs chargé d'évacuer les cadavres de la chambre à gaz...
Cessia, quant à elle, a été admise dans le camp des femmes. Elle a pris sous son aile une jeune fille de treize ans qui a miraculeusement survécu à la chambre à gaz... À quelques jours de la libération du camp, cette dernière tombe malade...

Les dessins en noir et blanc, réalisés au fusain, sont fins, détaillés, très réalistes. Tout est gris, plombant, en totale adéquation avec le récit. Terriblement sombre et sans espoir mais terriblement efficace. Les expressions des visages, tantôt ternes, horrifiés, emplis de lassitude, fatigués, ou encore haineux, sont éloquentes. La grandeur des yeux et la perspicacité des regards surtout sont marquantes, mettant en avant la maigreur des visages et la force de l'émotion éprouvée du moment.

En voulant contribuer au devoir de mémoire, Pascal Croci nous livre ici une histoire percutante qui relie les deux protagonistes principaux, à nouveau persécutés presque cinquante ans après. À moitié fiction, à moitié documentaire, ce n'est qu'à la fin, dans les pages consacrées à l'entretien de l'auteur, qu'on arrive à faire la part entre faits réels et faits fictifs, entre personnages de fiction ou non. Ces dernières pages sont en fait aussi nécessaires que la bande dessinée elle-même. Elles se complètent et sont en mesure de pallier aux petits manquements de l'autre.

Le tout forme un ensemble percutant, saisissant, efficace. Je n'ai pas été totalement embarquée, les pages en effet se tournent bien trop vite car c'est bien trop vite que les événements se déroulent : les dialogues, bien que puissants, sont peu nombreux, ou plutôt trop courts, et de ce fait pas assez immersifs. Mais je ne pense pas que là était l'objectif de l'auteur de toute façon. Celui de nous rappeler de ne surtout pas oublier est atteint en tout cas, là est l'essentiel.

Est-ce un livre à conseiller ? Difficile à dire, mais à lire, oui, incontestablement.
Commenter  J’apprécie          558



Ont apprécié cette critique (55)voir plus




{* *}