AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de florigny


En 10 chapitres chronologiques, l'auteur met en scène Roger Arvenel, un jeune instituteur fraîchement diplômé de l'école des maîtres d'Aix-en-Provence, affecté à Tigali en Kabylie en septembre 1945. Porté par de nobles idéaux, idéologiquement sain, persuadé de la beauté des missions éducatives qui lui sont confiées, Roger venu pour apporter la lumière et la poésie, quitte son poste en 1957 dans la lueur des incendies, dans les hurlements des martyrs.


Il ne lui a pas fallu longtemps pour découvrir que la propagande de l'Etat qui vante les sacrifices que la France s'impose pour apporter la prospérité et l'éducation dans ses colonies, n'apporte en réalité que la misère que seules une épidémie ou une famine pourraient rendre plus grande encore. Au cours des années suivantes, Roger assiste aux premières révoltes, aux premières répressions sanglantes. Dans sa correspondance avec des collègues nommés en Indochine, à Madagascar, en Nouvelle-Calédonie, il assiste à l'inexorable marche de l'Histoire qui apporte au prix du sang, l'indépendance aux peuples opprimés, pillés de toutes leurs richesses, humaines, végétales et minières.


L'école des colonies n'est pas seulement un roman-document-historique. C'est aussi un splendide objet-livre, aux très riches et nombreuses illustrations faites de documents d'époque : affiches, cartes postales ou géographiques, planches pour la leçon de chose, consacrées au café, cacao, banane, mangue, arachide, hévéa, cotonnier, photos de classes ou des livres scolaires spécifiquement édités pour les enfants africains, aux titres éloquents : “Instruction provisoire pour l'école de jeunes négresses de Saint-Louis” dont le programme est précis : “L'enseignement comprendrait en priorité, la propreté et la bonne tenue d'une maison, la préparation des aliments, le blanchissage, la couture d'utilité domestique et non le luxe, le jardinage des légumes communs, la tenue d'une basse-cour, et, secondairement, la lecture, l'écriture et les quatre premières règles d'arithmétique”. Un enseignement amplement suffisant pour un Noir “qui est à peu près un homme comme les autres. Mais il faudra de longues années d'efforts pour qu'il arrive à valoir les peuples blancs” (Géographie vivante, Ch. Triaud, 1826), ou variante subtile “Les Noirs attendent de la fermeté chez leur formateur. Ils se savent faibles et souhaitent être aidés” (Questions scolaires aux missions, 1954), ou encore “Sous l'influence de la France, le Noir inerte devient un serviteur docile dont la force physique s'applique à un travail utile. […] Partout la France met heureusement en oeuvre le concours de l'indigène, soit pour consolider sa domination, soit pour en aider le développement” (La Géographie par l'image et la carte, 1923).


Didier Daeninckx rend hommage à Aimé Césaire : “Je parle de millions d'hommes arrachés à leurs dieux, à leur terre, à leurs habitudes, à leur vie, à la danse, à la sagesse. Je parle de millions d'hommes à qui l'on a inculqué savamment la peur, le complexe d'infériorité, le tremblement, l'agenouillement, le désespoir, le larbinisme”, ainsi qu'à Léopold Sédar Senghor qui ne craint pas de proclamer : “J'arracherai tous les rires Banania des murs de France”.
Commenter  J’apprécie          40



Ont apprécié cette critique (3)voir plus




{* *}