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Critique de Laureneb


J'ai été bouleversée par ma lecture de la Horde de Contrevent à ma première lecture, mais aussi à toutes mes relectures. J'étais donc émerveillée d'avance par ce nouveau roman d'Alain Damasio, mais j'ai finalement été tout à la fois agacée et renversée.
Des défauts voire des problèmes, oui. Une difficulté pour rentrer dans le récit d'abord, car le style " actions échevelées de façon cinématographique "ne me plaisait pas : l'auteur vaut mieux que des tirs de militaires façon super-héros américains. Mais je me doutais qu'il y aurait plus que ça. Autre problème, le gadget typographique. Dans la Horde, l'écriture et les signes sur la page avaient un sens, retranscrire le vent. Ici, je le qualifie de gadget, car cela ne sert pas directement l'intrigue, et on identifie vite les personnages. Et j'en viens à un autre problème : ces personnages ressemblent énormément à certains de la Horde. Sahar a la grâce physique et l'intelligence d'Oroshi, Agüero a en lui la hargne de Golgoth, Toni la fougue de Caracole moins sa poésie - et avec un langage "banlieue" parfois exaspérant, Ner ressemble à Erg à une lettre près, Arshavin a la noblesse de Pietro... Tous ressemblent donc trop à leurs aînés littéraires.
Enfin, autre problème pour moi, l'aspect politique. Les convictions personnelles de l'auteur prennent trop de place, puisqu'elles ne sont pas au coeur de l'intrigue. Certes, c'est de l'anticipation, mais les idées sur le contrôle omniprésent, la reconnaissance faciale, l'usage commercial de nos données, la marchandisation des relations humaines... ne sont pas si originales : Black Mirror et le gouvernement chinois sont passés par-là. Elles permettent d'établir le cadre, mais auraient pu rester un cadre. Cependant, les passages sur le politicien prêt à tout, à n'importe quelle manoeuvre électorale avec son storytelling, étaient plus convaincants. La fin est peut-être trop longue, trop optimiste et positive d'ailleurs, et aurait pu arriver plus tôt dans le récit.
Mais finalement, pourquoi ai-je trouvé ce roman si fort, et si bouleversant ? Pour l'écriture de Damasio, ses trouvailles, ses slogans qui claquent, ses scènes d'amour et de sexe qui sont à la fois poétiques et expressives, les chants de Saskia. Ses furtifs aussi et surtout, qui, s'ils ressemblent aux Chrones de la Horde, se révèlent si riches et mystérieux.
Et surtout, surtout, pour tous les passages sur les relations parentales, l'amour paternel et l'amour maternel. J'ai plusieurs fois eu les larmes aux yeux, j'ai pleuré aussi, reposant le livre pour souffler avant de pouvoir continuer. Quiconque a connu un deuil peut se reconnaître dans ses douleurs. Victor Hugo a élevé les Contemplations comme tombeau pour sa fille Léopoldine, Lorca et Sahar sont prêts à tout pour Tishka. C'est un roman d'amour, un cri d'amour polyphonique. Retrouvons l'enfant qui est en nous, pour être plus vif et plus heureux. Tiskha, son père et sa mère, m'accompagneront longtemps, et sont bien plus importants que les défauts du livre.
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