La clarté est effrayante.
C'est à la fois la lumière de la venue au monde, et le tunnel aveuglant qui précède la mort.
Qu'importe l'amour que lui porte sa mère; l'amour ne suffit pas à nous maintenir en vie.
-C'est à cause mes yeux que tu me trouves spéciale ?
-Non, dit-il, d'une voix devenue douce, rêveuse, en ôtant une boucle qui me barre le visage. Ils ne sont qu'une vaguelette en surface.
Je ne sais pas ce que j'attends de la liberté que je lui propose.
Elle pourrait voir l'océan. Assister à un lever de soleil en femme libre. Etre enterré près de la mer.
La musique se tait; le vent s'apaise; l'illusion se replie sur elle-même et meurt.
-J'aimerais qu'on ait un vrai piano, annonce Cecily. Même dans mon orphelinat minable, il y en avait un vrai.
[...]
-"Vrai" est un gros mot, ici.
Rhine, le Rhin.
Un fleuve, qui, quelque part, a recouvré sa liberté.
Je suis au-dessus de la cime des arbres.
Et je l'aperçois dans le lointain. Comme un murmure. Comme une suggestion timide. La fleur pointue du mouchoir de Gabriel, dont le motif est reproduit sur un portail en fer forgé.
C'est la sortie. A plusieurs kilomètres de moi.
Au bout du monde.
Quand je suis sûre d'être seule, je m'ensevelis sous un amas de feuilles mortes [...]
-Je veux m'envoler avec vous, leur lancé-je.
Je finis par comprendre que je m'agrippe à lui tout autant qu'il s'agrippe à moi. Nous voici tels qu'en nous-mêmes, deux petites choses mourantes, dans une monde finissant comme tombent les feuilles à l'automne.
[Les nuages] ont été témoins de notre destruction du monde.
Si je pouvais tout voir, comme le font les nuages, me contenterais-je de faire le tour du seul continent qui reste, toujours éclatant de couleurs et de vie en toute saison, tâchant de la protéger?
Ou rirais-je de l'absurdité du monde, allant où le vent me porte, dans l'atmosphère en perpétuel mouvement de notre planète?