Citations sur La Faussaire (43)
J’avais peur de la perdre. Peur qu’il lui arrive malheur. Je l’aimais tant ! Parfois je la grondais car elle s’affichait avec moi. Elle prenait beaucoup de risques. Nous étions tout le temps ensemble. Elle passait me voir au cabinet. Il lui arrivait de dormir au Château, avec sa fille. Je n’étais pas assez fort pour m’y opposer. J’avais tant de plaisir à la voir évoluer dans la maison. Sa manière de se déplacer est d’une telle grâce ! Je ne cessais de l’admirer.
Une fois, j’ai avancé la main pour la toucher ; elle a eu un geste de recul, comme ces enfants battus qui lèvent un bras pour se protéger des coups. Quand je ne la voyais pas, elle me manquait tellement que j’allais rôder du côté de Cernon pour voir sa maison et respirer son air. J’espérais l’entrevoir. Parfois, je téléphonais pour le seul bonheur d’entendre sa voix sur son répondeur. J’étais littéralement fou d’elle, dépendant, mais raisonnable en même temps.
C’était cruel, mais je savais bien que cette femme était trop jeune et trop belle pour moi. Je me consolais en pensant que j’étais son ami de cœur, son confident. De même, je mettais ses difficultés sexuelles sur le compte des scrupules qu’elle avait à tromper son époux.
Les yeux ouverts dans le noir, il étend la main pour la toucher. Elle pousse un gémissement ensommeillé. Le désir revient. Il a mal. Il a honte. Un homme qu’on ne désire pas est un homme qu’on n’aime pas. Est-elle aussi froide avec son mari ? Est-ce que lui aussi la dégoûte ou bien est-ce le sexe qui l’écœure ? Il rumine ces questions, s’endort, se réveille en sursaut, angoissé.
Que font les amants dans une chambre ? Ils font l’amour, oui ou non ? Si elle ne le veut pas, qu’elle le dise ! Pourquoi n’a-t-elle jamais envie de lui ? Qu’est-ce qui ne va pas chez elle ? Elle aime son mari, c’est ça ? Mais alors, que fait-elle ici ? Et pourquoi lui présenter Sophie ? Il en a marre de ses incohérences !
L’amour avec ou sans mots, rapide ou langoureux, tendre ou impérial, dans une position ou une autre… Elle ne se refuse pas, mais elle se crispe, imperceptiblement, ou s’absente, pressée d’en finir.
Dans une autre vie, je me vois bien en patricienne romaine ou en princesse égyptienne, allongée sur un sofa, pendant qu’un eunuque m’évente avec une ombrelle en papyrus.
Paul se méfie du luxe comme d’un vice auquel on prend goût. Après la mort de sa mère, entre palaces et champagne, il a vu son père jeter l’argent par les fenêtres avec des femmes éblouissantes. Plus il vieillissait, plus elles étaient jeunes et… chères. Mais Camille insiste. Elle veut s’offrir une « parenthèse extraordinaire ». Il est si rare qu’ils soient ensemble, qu’ils n’aient pas à se cacher.
Je m’en veux terriblement. Reste comme tu es, ne change rien, je t’aime tellement, tout entière, en Camille, en Shéhérazade. Merci pour ces belles roses que tu m’as fait livrer. Elles me rappellent ta douceur, ton arôme et ta grâce.
Ce que tu as aimé en moi, c’est le mystère, justement. Cette robe blanche dans Cernon, cette silhouette hors du temps, tu me l’as raconté cent fois. Et maintenant, tu voudrais que je sois crue, réaliste, transparente. « Ne changez pas de défauts ! » dit-on aux amoureux. « C’est pour eux qu’on vous aime aussi. » Si tu veux que je sois vraie, je peux l’être, mais es-tu capable de supporter la vérité ?