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Citations sur Souffles de tempête, poésies (7)

NOCTURNE


J'ai contemplé de loin la mer électrisée,
Toute de pâle feu.
Je pouvais deviner chaque vague frisée
A son phosphore bleu.

Je voulais m'enfuir dans la nuit orageuse,
Devenir l'élément,
Déferler et luire avec la vague creuse,
Impétueusement.

Pourtant je suis restée assise à la fenêtre
Et nul ne pouvait voir
Le phosphore caché qui courait dans mon être
Allumer mon œil noir.

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AU JARDIN DE MAI


Pour un poète vrai qui, passionnément,
Parcourt d'un pied léger la saison la plus belle,
C'est toujours un étonnement
Que la rencontre d'une ombelle.

C'est toujours une offrande, et c'est toujours un don
Qu'un nuage, un reflet, un rayon, un coin sombre,
Et c'est un trésor qu'un bourdon
Qui survole l'herbe, dans l'ombre.

Nos cœurs battaient de joie, ô printemps ! ô printemps !
Tout était bonne odeur, douce couleur, musique,
Jeunesse, allégresse physique.
- Mais nos fronts étaient mécontents.

Que fait-on quelque part, qu'invente-t-on d'horrible,
Dans le même moment qu'au sein du printemps clair
Le bourgeon le plus insensible
Cède à la crasse de l'air ?

La nature fleurit, bourdonne, encense, bouge ;
Partout brille, innocent, le paradis de mai ;
Le sol même espère et promet.
... Sauf aux lieux où la terre est rouge.

Un épouvantement barre chaque horizon.
Le monstre de la guerre est là, qui boit et mange.
À deux pas de notre maison,
La face de l'Europe change.

Du fond de l'avenir, au bruit sourd des canons,
Voici venir des temps qui ne sont plus les nôtres,
Notre époque sombre, avec d'autres,
Dans l'Histoire pleine de noms.

Mais le jardin en fleurs est plus fort que la guerre.
Tandis que tout s'en va, pourquoi fait-il si beau ?
Ce merle ne peut-il se taire
Pendant qu'on nous couche au tombeau ?

Nous mourons ! Nous mourons ! Mais le printemps embaume.
On tue au loin, mais les oiseaux sont triomphants.
Nous sommes ruine et fantôme,
Et nous nous sentons des enfants.
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PRÉSENCE


Que les pommiers d'avril ouvrent parmi l'aurore
Leurs mille blanches fleurs au cœur incarnadin
Ou que règne l'hiver sans feuilles et sans flors,
La mer est au bout du jardin.

On l'entend de partout, furieuse ou câline,
Léchant doucement l'herbe ou mangeant le terrain.
Elle est là, vivant monstre impatient du frein ;
La marée est sa discipline.

Oui, la mer est au bout du jardin ! Incessant,
Son rythme, nuit et jour, entre par les fenêtres.
On ne peut oublier, au plus profond des aîtres,
Ce voisinage menaçant.

Le raclement profond des grèves qu'elle drague
Berce tous les sommeils couchés au creux des lits,
Et l'on devine au loin ses plis et ses replis
Et la forme de chaque vague.

... Vers elle nous irons, de gradin en gradin,
Par les matins de joie et par les nuits pleurées.
— O vie humaine, ô sœur tragique des marées,
La mer est au bout du jardin !
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Féerie


À cheval, j'ai quitté ma maison et ma ferme
Pour le dehors d'octobre immensément fané,
Où, dès que sur nos pas le sous-bois se referme,
Mon frémissant cheval est impressionné.

Mon cheval, mon cheval, sommes-nous chez les fées ?
L'automne aux sept couleurs palpite autour de nous.
Ces fougères au vent, blondes et décoiffées,
Nous enveloppent d'or plus haut que nos genoux.

Le sol rouge est taché comme d'un sang de faune,
Ce hêtre illuminé projette des rayons...
Vois, les feuilles de l'air tombent par millions :
Il pleut orange et roux ! Il pleut rouge ! Il pleut jaune

Quelle aurore, au retour, teintera tes sabots !
Tu trembles, mon cheval... Y a-t-il quelque chose ?
Est-ce de voir, parmi les chemins les plus beaux,
L'automne s'effeuiller sur nous comme une rose ?
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Vœux


Je ne peux pas finir de songer à la mer...
Je voudrais retourner aux pays d'où j'arrive,
Derrière un paquebot voir s'effacer la rive,
Et, devant, s'élargir l'infini large ouvert.

Je regrette déjà les départs, les escales,
Les courses d'Orient qu'on faisait dans les ports.
Je regrette le calme plat, l'orage tors,
Et ces lames de fond, hypocrites et pâles.

Je voudrais par un sabord les nuits, les jours,
Errer de cale en pont, monotone et bercée.
Je voudrais, je voudrais vivre une traversée
Qui ne finirait pas, qui durerait toujours.

Oh ! J’en ai comme assez de tout et de moi-même,
Des plaisirs et chagrins mesquins et superflus,
De l'existence ici, méchante, basse et blême...
— Je voudrais m'en aller pour ne revenir plus.
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AU JARDIN DE MAI


Le printemps, au jardin de mai, nous faisait fête,
Et nos pieds étaient prêts pour la course et le bond.
Des arbres entiers sentaient bon.
Nous en pensions perdre la tête.

Nous allions, nous tenant la main, comme deux sœurs,
Sans presque nous parler, à grands pas, bouche bée.
Une frêle pluie est tombée
Qui semblait parfumée aux fleurs.

Les marronniers illuminés, tout blancs, tout roses,
Portaient leurs fleurs ainsi que de légers flambeaux.
Des lilas étaient lourds et beaux.
Nous y fîmes de longues pauses.

L'herbe montait à l'arbre, et l'arbre descendait
À l'herbe ; et les gazons berçaient des ombres rondes.
Une branche basse pendait,
Offrant des corolles profondes.

Nous disions qu'on ne peut s'habituer jamais
Au printemps, cette histoire irréelle de fées.
Ivres, par vaux et par sommets,
Nous voulions vivre décoiffées….
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MONTÉE DE MER


Une ville s'allume au bord de la mer pâle,
Sur la côte d'en face encore bleue à voir,
Long collier de lueurs, parure principale
De la terre et des eaux et du ciel et du soir.

Je saurai te forcer, ma jument effarée,
À descendre à travers la vase et les galets,
Entre les rochers noirs de la basse marée
Où le couchant qui meurt concentre ses reflets.

Nous piétinerons là jusqu'à ce que remonte
La mer qui déjà gronde, en mal de revenir.
L'ombre salée, au loin, t'écoutera hennir,
Inquiète, vers les mystères qu'on raconte.

Et, pour atteindre enfin tes impatients pieds,
Quand les vagues, couleur de coquilles murrhines,
Toutes blanches d'écume et les crins déployés
Presseront leur galop de cavales marines,

Alors, joignant ta course à la fougue des soirs,
Tu bondiras sous moi, ruée et cravachée,
Et la mer, formidable et pâle chevauchée,
Mêlera ses crins blancs au vol de tes crins noirs.
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