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Critique de pierreglenat


« Quand le vent soulève les coiffes – les Orphelines du Roy Soleil » Tome 1

écrit à quatre mains, cet opus historique de Béatrix Delarue & Lorraine Lapointe, nous plonge dans les migrations de la population féminine dès l'an 1670, entre la France et le Québec.

L'avantage majeur de ce roman historique :

les personnages défilent sous nos yeux comme dans un film : les couleurs, les sons, les odeurs nous parviennent dans leur beauté naturelle, dans le flot ininterrompu de la vie ! On les entend respirer, toucher, souffrir, se réjouir, brûler d'impatience comme dans un Opéra !

Marguerite et Madeleine sont les deux héroïnes : quel courage, quelle soif de vivre ! Elles croquent leur vie, la devancent, la surmontent, la subliment ! On suit leur parcours depuis l'hospice de la Salpêtrière jusqu'en Nouvelle France.

Superbe travail historique et sociologique de la part des deux auteures qui nous restituent le Paris du 17ᵉ siècle qui vit Jean-Baptiste Poquelin, alias Molière, arpenter ses ruelles et ses lieux emblématiques.

« Paris 1666 (Molière n'a plus que 7 ans à vivre) l'hiver est glacial ! Marguerite et Madeleine sont confiées à l'Hospice de la Salpêtrière. Elles poursuivent un apprentissage, l'une comme lavandière au bord de la Bièvre et l'autre comme aide-apothicaire dans le Jardin du Roy. »

En 1670, Marguerite et Madeleine ont 14 et 16 ans. Elles reçoivent une dot royale, traversent la France. Elles vont ainsi rejoindre, par Rouen, du Havre à Dieppe puis escale à La Rochelle, dernier bastion de la terre française.

Admiration, puis mal de mer, toutes les jeunes filles s'agitent sur le pont du bateau qui quitte la France. Bénéficiant, comme des centaines d'orphelines, de la dot royale de Louis XIV, elles peuvent embarquer dans le port de la Rochelle à bord de la frégate Sainte-Hélène. Leur destination, pleine de promesses, sera le nouveau monde, le bienheureux Québec !

En effet suite à une volonté du Roi Louis XIV, le monarque décide d'engager « une politique d'immigration en faveur de la Nouvelle-France et prend en charge le recrutement de filles pour s'établir, fonder un foyer et développer la colonie. Les volontaires âgées de 15 à 30 ans reçoivent une dot comprenant une somme importante pour l'époque et un coffret d'accessoires personnels. 

Sur 10 000 immigrants en Nouvelle-France, on compte 2000 femmes. 20 % ont moins de 30 ans et la moitié entre 15 et 25 ans. Plusieurs provinces de France sont représentées, le plus grand nombre provient de la Rochelle, puis des villes de Paris, Saint-Malo, Rouen, Nantes, Dieppe et Bordeaux en ordre décroissant. Ils viennent entre autres des campagnes du Poitou, de la Bourgogne et de la Franche-Comté. L'origine sociale est diversifiée dont 3 % de nobles et 12 % de bourgeois. »

« Les filles sont instruites, plus de 260 d'entre elles savent lire et écrire, peuvent amasser le pécule des fruits de leur ouvrage. Elles sont libres de partir ou rester à l'hospice. 15 % sont issues de la noblesse, lorsque le père décédait dans toutes les couches de la société française, la famille sombrait… C'est ainsi que Madeleine et Marguerite, nos deux héroïnes, pensionnaires de l'école Sainte-Claire de la Salpêtrière purent choisir leur destin, grâce à la dot du Roi Louis XIV. »

Pêle-mêle, partageons leur carnet de voyage :

« la fête de la Marie-Madeleine, à bord de la frégate :
 La chanson composée par Madeleine, accompagnée à la flûte par Marguerite a beaucoup de succès, chacun y va d'un couplet dans sa langue. »

« Soudain, la brume se dissipe, la banquise apparaît sur la mer d'huile. le soleil perce à nouveau, réchauffe le coeur des passagers stupéfaits devant la beauté du spectacle… Bienvenue à Terra-Nova, prononce avec un fort accent breton, un marin-pêcheur… La frégate s'engage dans le golfe Saint-Laurent. »

« Brutalement, on ressent une secousse sur tout le navire, les passagers sont projetés les uns sur les autres, la Sainte-Hélène vient de s'imbriquer dans des rochers, enserrée comme dans un étau. La frégate craque avec fracas, puis s'immobilise en rendant l'âme… Marguerite suit des yeux la lumière de la lanterne. Nicollas Langlois, médecin, vient de lui sauver la vie. Brusquement, le passage vers la Sainte-Barbe s'ouvre, des hommes crient :
– Il faut sortir sur le pont !

Dans le petit matin, rassemblés pour constater que la Sainte-Hélène est toujours à flot − ils sont pourtant vivants… »

NOUVELLE-FRANCE, 18 AOÛT 1670

Le décor majestueux s'offre à leurs yeux étonnés : des monts semblables à d'immenses mamelons, un ciel bleu clair d'azur et la terre qu'ils n'ont pas vue depuis de longues semaines. Devant ce spectacle éblouissant, les femmes agitent leurs mouchoirs de cou…

Un vieil homme, fumant une pipe faite d'une racine évidée :
– Bienvenue en Nouvelle-France !

Et le dernier mot de ce premier tome est pour Madeleine :

« Tout est majestueux ici, ce ne sont que de grands espaces, de grandes mers, je ne sais si je m'habituerai… » 

De manquez pas le tome 2 de cette aventure hors norme, il a pour nom mystérieux :

« Les Demoiselles du grand Yahndawa ! »

Bravo à Béatrix Delarue & Lorraine Lapointe, pour leur travail minutieux si riche en documentations de toutes sortes. Félicitations pour leur talent de narratrices d'une époque et d'une destination fascinante, le Québec du nouveau monde !
Lien : https://editions-exaequo.fr/..
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