Vingt garçons sont réunis dans le hall d'accueil, leurs bagages à leurs pieds. Certains semblent se connaître. Elliot observe sans surprise qu'il est l'un des plus petits. Il ne peut s'empêcher de dévisager les autres internes comme s'ils étaient les participants d'un grand jeu de télé-réalité : Des adolescents coupés du monde. Mais il n'y a pas de caméra. Ils sont laids, tous. Normal. S'ils se trouvent là, c'est que leur histoire s'est fracassée quelque part. Dans l'enfance ou au cours de l'été qui s'achève. Ici, c'est l'«alternative». L'alternative à quoi ? «Une chance pour toi, tu verras», a dit son éducateur.
“Il veut rester dans son orbite dorée, ses grains de poussière en suspension, son parfum de pommes tombées dans le gazon de fin d’été”
Ulysse, resté en arrière, se met à crier :
- Je sphaigne, madame !
Il a barbouillé d'encre rouge son pouce qu'il tient dans sa main gauche, le visage crispé par la douleur.
- Mais c'est pas vrai, il a le calembour vissé au corps, c'te pauvre gosse, soupire Mme Carette. (p.272)
En effet, cinq minutes après, tandis qu'il déambule entre des concrétions boueuses de céramique au milieu de plantes en pot anarchiques, Elliot a le loisir d'observer du coin de l’œil l'espèce de véranda décrépite qui sert de lieu d'exposition à la belle saison.
Au dessert, elle fait le geste de quelqu'un qui n'a plus faim et donne son bol de riz au lait à l'huile essentielle de lavande à Elliot qui le bâfre en trois secondes malgré la sensation déroutante de mâcher une chemise de nuit de grand-mère. (p.230)
La plupart des gars, à l'internat, ne se lavent pas les dents, c'est comme faire les devoirs, les exercices de maths et les conjugaisons, un truc, tu vois pas tout de suite à quoi ça te sert. (p.243)
Des fois, Elliot a des envies bizarres. Il a envie de faire des gestes tendres, dans les moments les pires. Il se voit en train de le faire et il a très peur de passer à l'acte. (p.35)
"Vestige du paradis" brille sous la lampe.
Dans la haie, un blaireau entame sa chasse aux pommes.
Il y a un pommier dans le champ voisin.
- Tais-toi, bouffon, on t'a pas appelé. Fais-toi rire tout seul la prochaine fois.
L'auteur de cette réplique, c'est Elliot. Péline n'en revient pas.
- Si, je te jure, Mme Berruche leur a demandé en pointant le doigt sur un verbe au tableau : "C'est quel temps, là ?" et Henrique a regardé par la fenêtre et il a dit : "Il pleut.". (p.102)