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Critique de Diabolau


Juste après avoir lu "Au bagne" d'Albert Londres, qui m'a littéralement passionné, je n'ai pas voulu en rester là et j'ai directement embrayé sur le témoignage d'Eugène Dieudonné, ancien de la bande à Bonnot, condamné à mort (a priori pour pas grand-chose), gracié par le fait du prince et envoyé aux travaux forcés à perpétuité. Dans son ouvrage, Londres évoque d'ailleurs longuement le cas Dieudonné, avec lequel il a sympathisé, au point que c'est lui qui est ensuite allé le récupérer au Brésil après une évasion pour lui annoncer qu'il était amnistié et qu'il pouvait rentrer en métropole. Dieudonné semble d'ailleurs avoir écrit ses mémoire sur le conseil du journaliste, qui signe la préface.
"La vie des forçats" est presque plus passionnant encore que "Au bagne", en cela qu'il rapporte des anecdotes de la vie des "fagots" dont seuls ceux qui les ont vécues directement en tant que condamnés pouvaient témoigner, et que même un journaliste aussi malin que Londres ne pouvait pas connaître.
C'est certes assez factuel : Dieudonné était un ébéniste, pas un écrivain. L'écriture est simple, mais d'une grande clarté, et l'auteur sait faire preuve malgré tout, à l'occasion, d'un excellent sens de l'analyse.
On découvre donc un microcosme d'une complexité incroyable, véritable monstruosité de vice, de corruption et d'injustice. L'humanité de certains personnels de la pénitentiaire, et notamment des médecins, aura beau faire, ils ne pouvaient que constater les dégâts d'une véritable machine à aggraver les problèmes plutôt qu'à les régler. "Les plus sains d'esprit étaient ceux qui tentaient de s'évader, et les surveillants le savaient bien", voilà une phrase qui, à mon sens, résume tout. 1 000 morts par an sur 5 000 forçats en moyenne, des chiffres qui rivalisent avec Dachau ou Buchenwald.
Au passage, je dois constater encore la condescendance avec laquelle Dieudonné parle souvent des "nègres", que l'on retrouve également dans l'ouvrage de Londres. Un moment, il cite en exemple le bagne américain de Porto Rico, dont les méthodes sont, selon lui, bien plus humaines et bien meilleures que les méthodes françaises pour amender les prisonniers. Et entre d'autres mesures qui en effet sont de bon sens (pas de cachot, pas de privation de nourriture, etc.), il cite celle-ci : "les prisonniers noirs et les prisonniers blancs étaient séparés."
Une preuve de plus du racisme systémique qui gangrénait la société occidentale au début du siècle dernier.
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