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Critique de Arakasi


Commençons par le commencement… Et le commencement, contrairement à ce que l'on pourrait croire, ce n'est pas un jeune gascon de dix-huit ans débarquant à Paris pour y trouver gloire et fortune. Non, c'est un romancier de quarante-deux ans, à l'allure un peu fauchée et débraillée, farfouillant dans les archives de la Bibliothèque Nationale à la recherche d'une nouvelle source d'inspiration. Tiens, voici un manuscrit intéressant ! Les « Mémoires de M. D Artagnan, capitaine lieutenant de la première compagnie des mousquetaires du roi ». Notre auteur feuillette les pages jaunies d'abord avec curiosité puis avec de plus en plus d'excitation. Certes, l'oeuvre elle-même n'est que d'un médiocre intérêt littéraire, mais l'homme de plume y devine le potentiel d'une fabuleuse histoire : des duels haletants, d'ébouriffantes chevauchées à travers la campagne française, des sièges épuisants, des intrigues de cour… L'imagination surexcitée de notre romancier est surtout frappée par trois noms, simplement évoqués au détour d'une page : Athos, Porthos et Aramis. Quels noms énigmatiques et romantiques ! Comme ils doivent dissimuler de mystères et de merveilleuses aventures ! Ni une, ni deux, il embarque le manuscrit – qu'il ne songera jamais à rendre d'ailleurs – avec lui et le ramène dans son appartement où il se met aussitôt à écrire.

Et quelques mois plus tard – ou quelques siècles plus tôt, cela dépend du point de vue – un jeune gascon débarque à Paris, la bourse vide, le coeur débordant d'espoir et d'ambition et avec, entre les jambes, un affreux cheval jaune offert généreusement par son père. Il est fier, buté, valeureux, rusé comme un renard, mais irascible à l'excès. Il a soif de vie, d'argent, de reconnaissance, d'amour, d'amitié aussi, bien entendu… Toutes choses qu'il trouvera bientôt à Paris, même s'il l'ignore encore et que ces dons bénis seront contrebalancés par de terribles douleurs. Ce jeune gascon, c'est D Artagnan. Nous le connaissons à peine, mais, mordieu, comme nous l'aimons déjà !

Depuis le temps que je vous bassine avec Alexandre Dumas, il était temps que je revienne un peu aux grands classiques, n'est-ce-pas ? Et mon grand classique à moi, la pierre angulaire de mon amour pour le cape et d'épée, c'est « Les Trois Mousquetaires ». Quinze ans plus tard, je garde toujours un souvenir délicieusement nostalgique de ma première lecture des « Mousquetaires » et des heures exaltantes passer à dévorer des pages et des pages de complots et d'aventures en me cachant de mes parents et de mes amis. Depuis, j'ai lu et relu de nombreux romans du sieur Dumas, mais aucun ne m'a fait une aussi puissante et durable impression que « Les Trois Mousquetaires », aucun ne m'a procuré autant de pur plaisir littéraire. le roman ne manque pourtant pas de défauts objectifs : une intrigue un peu décousue, des clichés à la pelle, des personnages féminins plutôt insipides (à l'exception d'une, mais alors quelle femme, mes aïeux, quelle femme !)…

Mais à ceux qui pinailleront sur ces maigres détails, je n'ai qu'une réponse à faire : on s'en fout ! « Les Trois Mousquetaires », c'est plus qu'un simple roman, c'est juste un des plus épatants récits sur l'amitié qui aient jamais été écrits. Amant volage et inconstant, Dumas fut en revanche un excellent ami et, s'il n'a jamais été à l'aise avec la romance, il a toujours su parler avec talent de camaraderie et de fraternité et, surtout, faire partager ces sentiments à ses lecteurs. A mon avis, si « Les Mousquetaires » reste le roman préféré de tant de lecteurs, c'est parce que Dumas, dans toute son immense oeuvre, n'a jamais su créer de personnages plus attachants et profondément marquants que D Artagnan, Athos, Porthos et Aramis. Comment ne pas les adorer ? D'Artagnan, l'homme aux mille tours, aux mille ruses ! Porthos, le géant vaniteux au coeur d'or ! Aramis, fin comme une lame et roué comme serpent ! Et Athos… Ah, j'avoue, à treize ans, j'étais à moitié amoureuse d'Athos, le grand seigneur déchu à l'humour grinçant et au coeur brisé, et je le suis toujours un peu.

Je pourrais vanter indéfiniment les multiples qualités des « Trois Mousquetaires » – le style sans pareil de Dumas, la reconstitution grandiose de l'époque de Louis XIII, la morgue et le génie de Richelieu, la séduction démoniaque de Milady de Winter, etc. – mais d'autres l'ont déjà très bien fait avant moi et quelques pauvres paragraphes supplémentaires n'y suffiraient jamais. Je m'arrêterais donc là pour le moment, mais pas pour longtemps.

A très bientôt pour une nouvelle séance de couinage épique, mais cette fois sur « Vingt ans après » !
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