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Critique de manU17


Il est des livres qui s'imposent à vous sans que vous l'ayez vraiment voulu. Je suis chez Emmaüs, à la recherche de livres de poches, comme souvent. Quand soudain, je vois ce livre. Je prends, le regarde. Je ne peux plus le lâcher ou il ne veut plus que je le lâche, il m'appelle, je dois le prendre, il le faut.

Je connais son auteur, je connais son histoire. A sa sortie, en 1992, il y a 21 ans donc, ça ne me rajeunit pas, ma grande soeur l'a lu et nous en avions parlé. le drame vécu par cette petite fille de huit ans ne peut pas laisser indifférent. Ce voile noir, ce voile protecteur, ce voile anesthésiant, ce voile pudique, Anny Duperey va s'employer à le soulever et se replonger dans tout ce douloureux passé pour mieux l'accepter enfin, peut-être… Peut-on vraiment finir par accepter l'inacceptable ? Surtout, quand le temps, les années et surtout la douleur, se sont employés à noyer, à étouffer, à enterrer, tous ces souvenirs, toute cette douleur dans les brumes de l'oubli…

Les souvenirs vont être notamment ravivés grâce aux photos de son père, le photographe Lucien Legras. Photos conservées pendant des années dans le fameux « tiroir sarcophage » sans jamais être regardées. Trop de chagrins, trop de colères, la peur de la douleur qu'on ravive, l'envie qui ne vient pas, l'envie qu'on ne laisse pas venir à soi. Plus tard, il sera encore temps, puis un jour, il est temps.

Je n'ai pas du tout ouvert le livre avant de le lire, je n'ai pas regardé les photos avant. Je voulais les découvrir au fur et à mesure de ma lecture, chapitre après chapitre, selon la chronologie voulue par l'auteur. Je ne pouvais pas faire autrement, il le fallait.

Le photographe a un réel talent. Les angles, les prises de vue, les jeux d'ombres et de lumière, les reflets dans l'eau, la brume, la neige, nous donnent des photos marquantes, touchantes, parfois troublantes. C'est à partir de ces images d'un passé ressurgi que l'écriture va prendre forme, va être le moteur, l'élément déclencheur nécessaire à la démarche. Démarche qui ne peut pas être simple, quand certaines émotions, certaines douleurs ressurgissent, jaillissent et vous éclaboussent, au détour d'une image, d'un maillot de bain en tricot, d'une manche retroussée, d'un regard tellement vague, tellement déjà ailleurs, au détour d'un mot aussi…

N'allez pas croire que tout n'est que tristesse et noirceur, ses souvenirs riment aussi avec plaisir et avec rires, c'est un livre sur la vie. Que j'ai ris en découvrant la recette du « gâteau de mémé », un défi aux lois de la diététique, une alternative à la faim dans le monde peut-être…

Les chapitres défilent, les pages se tournent, la fin approche, le récit de leur fin aussi, les mots nous portent, l'émotion nous transporte. Les mots d'une femme, les maux d'une petite fille, son regard. Comment tout s'est passé, une enfant assoupie, l'asphyxie, des parents « endormis » pour toujours, ce sifflement, le réveil, l'inquiétude, la découverte, le brouillard, le vide, le voile…

Je finirai sur le laconique chapitre intitulé « Les enfants sont charmants » où quand l'antiphrase prend tout son sens. Comment culpabiliser davantage encore une enfant qui n'avait déjà besoin de personne pour ça, « Dis, c'est vrai que tu as laissé mourir tes parents ? » Oui, « Les enfants sont charmants » parfois…

Alors que je n'avais jamais envisagé lire ce livre que j'imaginais lourd et mélodramatique, sa lecture m'a emporté, m'a transporté et parfois ému. Une écrite forte, d'une grande puissance d'évocation, au service de l'histoire d'une vie. Anny Duperey, une comédienne, un écrivain.

Lien : http://bouquins-de-poches-en..
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