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Critique de Cigale17


Je remercie infiniment Babelio et les éditions Buchet/Chastel pour l'envoi de ce livre étrange et passionnant.
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Avant d'y prendre un vrai plaisir, j'ai eu beaucoup de difficulté à entrer dans ce livre qu'on peut difficilement qualifier de roman, je crois. Au demeurant, si la mention figure sur la quatrième de couverture, elle est absente des pages-titres. Claudia Durastanti choisit de nous parler d'elle, L'étrangère, à la première personne et en gardant son prénom. Elle divise son livre en six parties thématiques qui font penser à un horoscope. La dernière s'intitule d'ailleurs « De quel signe es-tu ? ». La première partie adopte un récit à peu près chronologique, et concerne, en quelque sorte, la genèse de cette histoire. Les deux parents de la narratrice sont sourds ; son père l'est de naissance, sa mère l'est devenue à quatre ans, à la suite d'un méningite. Claudia parle de la rencontre de ses parents comme ils la racontent eux-mêmes : chacun prétend avoir sauvé la vie de l'autre. Les grands-parents de Claudia ont immigré aux États-Unis et continuent à y vivre. Elle est née à Brooklyn, mais à six ans, elle se retrouve dans une région montagneuse et perdue d'Italie, la Basilicate. En plus de composer avec la surdité de ses parents (sa mère refuse de parler la langue des signes et Claudia ne signe pas non plus), sa vie va se construire à partir de ce tiraillement entre deux pays, deux langues, presque trois avec le dialecte local. Les autres parties du livre sont constituées de moments de vie, d'anecdotes, de réflexions diverses qui obéissent à des thématiques présentées dans la table des matières, sans souci de chronologie ni de trame narrative.
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Paradoxalement, c'est la première partie, la plus « classique », que j'ai le moins aimée, peut-être parce qu'elle concerne les parents et la famille plus que la narratrice. Peut-être aussi parce que j'ai rarement réussi à éprouver de l'empathie pour la mère et jamais pour le père ! Composée de minuscules anecdotes, cette partie intitulée « Famille » présente pléthore de personnages. Je me suis perdue dans les noms, je ne savais pas toujours si j'avais à faire à la famille italienne ou à l'américaine. Curieusement, si on se perd dans les noms des trois générations de la famille, les très proches ne sont pas nommés : nous ne saurons le nom ni du père, ni de la mère, ni du frère, ni plus tard celui du compagnon… Bref, il m'a fallu arriver à la deuxième partie, « Voyages », pour commencer à aimer ma lecture. La narratrice décortique les différents sentiments qu'elle éprouve à se sentir étrangère où qu'elle soit. Elle se sent étrangère et dans le regard des autres (compagnes de classe, relations passagères, collègues de travail, etc.), elle l'est effectivement. Elle mentionne ses treize ans d'analyse sans vraiment développer, au détour d'une phrase. Dans sa construction d'adulte, nous la suivrons aussi à Rome et à Londres.
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J'ai souvent été déroutée, mais charmée par certains passages, alors que d'autres sont restés bien mystérieux : « [Ils] me lançaient des petites pièces en argent par les oreilles pour me faire rire » ou encore « [il] tournait dans la maison le regard vide, ralenti par le diabète des zombies », et je pourrais multiplier les exemples. L'immersion dans la lecture, les références littéraires, musicales et cinématographiques dénotent une solide culture, et provoquent une intense curiosité chez le lecteur. Les développements sur le langage ou sur les difficultés de la traduction m'ont passionnée. Pour toutes ces raisons, aussi originale, parfois magnifique et passionnante soit-elle, cette lecture n'est pourtant pas un coup de coeur. J'ai moi-même eu, trop souvent, le sentiment d'être étrangère à ce texte…
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